Luke Gannon par l’intermédiaire de ses tuteurs d’instance et responsables légaux, et autres, c. l’état du Kansas, 298 Kan. 1107, 319 P.3d 1196 (2014) [Gannon I]; 303 Kan. 682, 368 P.3d 1024 (2016) [Gannon II], --- Kan. ---, --- P.3d --- (2016) 2016 Kan. L

La Cour suprême du Kansas décide que le financement des écoles devrait être équitable et sufissant

Cette affaire consistait à déterminer si le financement des écoles par l’état du Kansas était équitable et suffisant, comme l’exigent les dispositions constitutionnelles de l’état régissant la prestation de services d’éducation. Après que des violations ont été constatées en lien avec la distribution équitable de fonds et la suffisance de ces fonds pour assurer l’éducation exigée par la Constitution, l’état du Kansas a été tenu de revoir et d’ajuster son financement de l’éducation. Cela nécessitait l’application de mesures par l’assemblée législative sous la supervision continue de la Cour suprême de l’état.  

Date de la décision: 
2 Mar 2017
Forum : 
Cour suprême de l’état du Kansas
Type de forum : 
Domestique
Résumé : 

En 2010, quatre districts scolaires, 31 élèves et leurs responsables légaux ont intenté des poursuites contre l’état du Kansas alléguant qu’à la suite des compressions budgétaires dans l’enseignement public commencées en 2009, les écoles n’avaient pas suffisamment de fonds et une partie de ces fonds était répartie de façon inéquitable, en violation de l'article 6 de la Constitution du Kansas (régissant la prestation de services d’éducation), des lois étatiques et des clauses des Constitutions du Kansas et des États-Unis relatives à l’application régulière et la protection égale de la loi.  En 2013, un tribunal spécial à trois juges a statué que l’état avait violé l’article 6 en sous-finançant l’enseignement public primaire et secondaire entre 2009 et 2012 et que l'assemblée législative n'avait pas tenu compte des coûts réels de l'éducation exigée par la constitution avant de prendre ses décisions en matière de financement.  Ils ont de plus statué que d'autres violations de la Constitution avaient été commises du fait que l’assemblée législative avait soit retenu ou réduit une part du financement qui revenait de droit aux districts scolaires.

En appel, en mars 2014, la Cour suprême de l’état du Kansas a conclu que le tribunal n’avait pas appliqué le bon critère de suffisance en lien avec l’article 6, mais avait déterminé à juste titre que l'état avait mis en place un système inéquitable.  Concernant la suffisance, le bon critère était de savoir  si « le système de financement de l'éducation publique offert par l'assemblée législative ... – par sa structure et sa mise en œuvre – est raisonnablement calculé de façon à ce que l’ensemble des élèves de l’enseignement public du Kansas atteignent ou dépassent » les niveaux établis dans l’affaire Kentucky Rose c. Council for Better Education, qui étaient axés sur les résultats des apprenants et ont été codifiés dans la législation du Kansas. La conformité avec l'exigence d'équité voulait dire que « les districts scolaires doivent avoir un accès assez égal à une offre éducative essentiellement similaire grâce à un même effort fiscal ».

La Cour suprême du Kansas a renvoyé l’affaire pour que le tribunal à trois juges rende une décision en matière de suffisance et fasse appliquer les décisions concernant l’équité en fonction du critère d'équité mieux défini.  Par la suite, l’assemblée législative de 2014 a promulgué une loi ajoutant environ 130 millions USD en financement afin de réduire les disparités fondées sur le revenu entre les districts et ainsi corriger le déficit.  En juin 2014, le tribunal a approuvé cette correction considérant qu’elle répondait à l’exigence d’équité.  

En décembre 2014, le tribunal a réaffirmé que le système de financement des écoles était inadéquat et réitéré sa décision concernant l'équité, constatant la conformité substantielle de l'assemblée législative.  Il a conclu que même si les niveaux de financement étaient suffisants en juillet 2008, le financement global avait depuis lors baissé de 9.1 pour cent en tenant compte de l’inflation, devenant ainsi « insuffisant de tout point de vue rationnel des preuves présentées ou avancées ».

En mars 2015, le gouverneur a donné force de loi au projet SB 7, introduisant un système de subventions globales qui a gelé le financement des écoles au niveau de l'exercice financier 2015 pendant deux autres années.  Les districts scolaires ont réagi en déposant une requête pour jugement déclaratoire et une demande d'injonction.  En conséquence, le tribunal a conclu que la loi SB 7 était inconstitutionnelle aussi bien sur le plan de la suffisance que sur celui de l'équité et a émis une ordonnance restrictive provisoire. En juillet 2015, la Cour suprême du Kansas a scindé l’affaire, décidant d’examiner les questions d’équité et de suffisance séparément. En février 2016, la Cour a conclu que l’état n’avait pas réussi à démontrer que les changements qu'il avait apportés au système de financement des écoles avait corrigé les iniquités.  Cependant, à la suite d’une suspension de la procédure jusqu'à la fin juin 2016, l'assemblée législative a finalement remédié aux iniquités.  

Suite à une période de mesures étatiques visant à corriger les violations, la Cour suprême du Kansas a rendu, en mars 2017, une décision concernant la suffisance du financement des écoles.  La Cour a conclu que le système étatique de financement de l’éducation publique, par sa structure et sa mise en œuvre, n’était pas raisonnablement calculé de façon à ce que l’ensemble des élèves de l’enseignement public primaire et secondaire du Kansas atteignent ou dépassent les niveaux Rose.  Concernant la structure, la Cour a signalé que le système de financement ne faisait que créer un fonds en gelant le financement des districts scolaires pendant deux années scolaires au niveau d’une année précédente, ce qui ne permettrait qu’une capacité de réaction minimale à l’évolution des conditions ayant des incidences financières, telles que l’inscription. Concernant la mise en œuvre, celle-ci a été jugée insuffisante du fait que l’état n’avait pas réussi à doter environ un quart des élèves du primaire et du secondaire des compétences de base en lecture et en mathématiques et que des groupes importants d’élèves plus difficiles à éduquer avaient été laissés pour compte.  La Cour a statué que les données montraient que les piètres résultats des tests étaient liés aux niveaux de financement.  

Considérant le financement des écoles insuffisant, la Cour a décidé, comme elle l’avait fait par le passé, de donner à l’assemblée législative l’occasion d’assurer la mise en conformité du système d’éducation de l’état.  Une fois qu’un nouveau système de financement sera adopté, l’état devra démontrer de façon satisfaisante que cela est raisonnablement calculé pour remédier aux violations constitutionnelles qui ont été relevées avant la fin de juin 2017.

Application des décisions et résultats: 

L’exécution des diverses décisions a pris plusieurs années.  Par exemple, en ce qui concerne le volet équité de l’affaire, en avril 2016, le gouverneur a donné force de loi au texte du Sénat remplaçant la loi HB 2655 et annoncé les corrections législatives.  Entre autres choses, la loi  HB 2655 modifiait les formules pour certains types d’aide, prévoyait une aide de péréquation et permettait que la loi SB 7 et d’autres lois antérieures relatives au financement des écoles soient radiées.  Après un nouvel examen de la part de la Cour, les mesures ont encore une fois été jugées inconstitutionnelles en mai 2016 et la date limite du 30 juin 2016 a été affirmée.  Une séance spéciale de l’assemblée législative tenue en juin 2016 a porté sur la question de l’équité, rétablissant la formule de péréquation au calcul antérieur au système de subventions globales et prévoyant un financement intégral, assurant ainsi la conformité en matière d’équité.  Ceci a été approuvé par la Cour suprême le 28 juin 2016. En ce qui concerne le volet suffisance, « d’autres informations s’ajouteront à ce résumé en temps voulu ».

Le 5 juin 2007, l’assemblée législative a répondu à la décision Gannon IV par la loi SB 19.  Elle a réadopté la majeure partie de la vieille formule mais a ensuite continué à la « sous-financer » considérablement.  La loi SB 19 prévoit une augmentation de 293 M$ sur deux ans. Le Conseil scolaire de l’état avait recommandé 893 M$, le tribunal de première instance avait conclu qu’il fallait 819 M$. Revenir au « dernier état constitutionnel » en dollars de 2006 coûterait 449 M$ en dollars de 2006. L’étude de coûts commandée à Augenblick & Myers par l’état, actualisée en tenant compte de l’inflation, imposerait un montant additionnel de 1.64 milliards $ et la Kansas Legislative Post Audit Cost Study, actualisée en tenant compte de l’inflation, imposerait un montant additionnel de 1.76 milliards $. Quelle que soit la mesure utilisée, la loi SB 19 semble rater nettement la cible.

Il incombait à l’état de prouver que la loi SB 19 avait réglé le problème.  La question a été portée devant la Cour suprême du Kansas et débattue le 18 juillet 2017. Les questions posées par les juges au cours de la discussion indiquaient qu’ils semblaient prêts à rejeter la loi SB 19 comme solution.

En attendant la décision Gannon V, il reste à voir si la cour exigera que l’assemblée législative se réunisse à nouveau en session extraordinaire pour trouver des fonds supplémentaires.

Groupes impliqués dans le cas: 

Schools for Fair Funding

Importance de la jurisprudence: 

Cette affaire fait partie d’une série d’affaires où la Cour suprême du Kansas a examiné la formule de financement des écoles appliquée par l’assemblée législative, l’a jugée inconstitutionnelle et a ordonné à l’assemblée législative de corriger les failles. Cette décision était particulièrement importante car, si l’assemblée législative n’était pas parvenue à adopter une formule de financement équitable avant la fin de juin 2016, les écoles publiques du Kansas n’auraient pas ouvert leurs portes en août pour l’année scolaire 2016-2017. De plus, bien que des questions de séparation des pouvoirs se soient posées (au motif que ce sont là des questions qui devraient être tranchées par l’assemblée législative et non par le pouvoir judiciaire, ce qui s’accompagnait d’une menace de la part du gouverneur de l’état de réduire le budget judiciaire et d’apporter d’autres changements qui auraient une incidence négative sur les juges), cette affaire confirme que les tribunaux peuvent examiner des décisions étatiques concernant le financement des écoles et rendre des décisions concernant la légalité de mesures étatiques pour corriger les iniquités et les insuffisances de financement.  Comme dans toute affaire relative à l’éducation, il est important de tenir compte de l’impact sur les enfants et les jeunes concernés, compte tenu qu’ils ne peuvent pas suspendre leurs études pendant un litige de longue durée.