Plusieurs membres du Réseau-DESC demandent justice pour Berta Cáceres

Date de publication : 
Jeudi, 20 septembre 2018

Le 17 septembre marque le premier jour du procès dans l'affaire du meurtre de la défenseur des droits humains hondurienne Berta Cáceres et de la tentative d'assassinat de Gustavo Castro.

L'attaque, qui s'est produite le 2 mars 2016, faisait suite à une journée de mobilisation sociale efficace d'organisations et de défenseurs, encouragés par l'organisation que dirigeait Cáceres (el Consejo Cívico de Organizaciones Populares e Indígenas de Honduras, COPINH). Ces organisations et défenseurs s’opposaient à la construction d’un projet hydroélectrique « Agua Zarca » et aux impacts que le projet aura sur le territoire du peuple autochtone Lenca.

L'incident a été largement reconnu comme un cas emblématique, dans lequel les mouvements sociaux et les organisations de base, ainsi que leurs ONG alliées, ont contesté un mégaprojet qui menaçait d’avoir de graves effets négatifs sur les droits humains, et ont subi des représailles violentes à la suite. Depuis l'incident, l’affaire a été extrêmement surveillée par plusieurs acteurs de la société civile en Amérique latine, dont plusieurs membres du Réseau-DESC.

Le Honduras étant suivi de près par la communauté internationale, plusieurs experts juridiques et défenseurs des droits humains ont dénoncé les violations des droits des victimes au cours du processus, et  la violation des mêmes réglementations applicables en matière de procédure. Des observateurs de l'affaire ont allégué que le bureau du procureur avait entravé le processus judiciaire à travers d’efforts visant à éviter l'exécution de rapports d'experts, à empêcher une procédure régulière, à occulter des informations et à empêcher l’analyse de preuves et d’expertises, y compris celles qui avaient été sauvées suite aux perquisitions, pouvant impliquer la société DESA, propriétaire du projet Aguas Zarca. Ils allèguent le refus, par le ministère public, de présenter l’information et les expertises fondamentales pour le processus de vérité. Ils condamnent également le gouvernement hondurien qui a refusé la création d'une commission indépendante garantissant une enquête adéquate pour l’administration de la justice. Les observateurs allèguent que la Cour de justice, responsable de la résolution de cette première procédure judiciaire, a rejeté la reconnaissance de COPINH en tant que victime, même s'il a été établi que la principale défense des droits humains contre la menace d'Aguas Zarca a été menée par le collectif indigène. Les rapports reçus affirment que la Cour n’a pas non plus accepté la proposition de principaux témoins attestant de la participation d’employés de la DESA dans le crime.

Les membres du Réseau-DESC rappellent que l'État du Honduras a l'obligation de rendre justice face aux violations graves des droits de l'homme. Ces obligations découlent, entre autres, des engagements que l’État hondurien a lui-même accepté dans le cadre de la Convention américaine relative aux droits de l’homme (notamment ses articles 1.1, 8.1 et 25) et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (notamment dans son article 2.3). L'affaire emblématique Velásquez Rodríguez v. Le Honduras devant la Cour interaméricaine des droits de l'homme a précisé que les États permettant l'impunité pour les atteintes aux droits humains sont internationalement responsables de ces violations. En 2016, le Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l'homme a averti le risque d'impunité dans l’affaire du meurtre de Berta Cáceres.

Dans l'espoir que l'affaire puisse clarifier tous les antécédents et le contexte dans lequel s’est produit ce crime contre Berta Cáceres, les membres du Réseau-DESC demandent que le procès garantisse la transparence et le respect des droits des victimes, et notamment la reconnaissance de COPINH en tant que victime. Ils exhortent le gouvernement hondurien à prendre les mesures nécessaires pour prévenir de nouveaux actes de répression et de violence contre les défenseurs des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux. Ils soulignent qu'il est temps pour le Honduras de démontrer au monde entier qu'il dispose d’un système juridique indépendant qui recherche la justice, la vérité et des garanties des droits humains ainsi que la volonté politique de mettre fin à l'impunité pour les crimes commis contre les défenseurs des droits humains dans le pays."