Plus de 280 membres du Réseau-DESC appellent à un traité plus fort pour réglementer les activités des entreprises

Date de publication : 
Dimanche, 13 octobre 2019

Au cours des deux derniers mois, des membres du Réseau-DESC de différentes régions se sont réunis pour analyser et discuter ensemble du contenu d’un Projet de Traité révisé, publié le 16 juillet 2019 dans le cadre du processus intergouvernemental en cours visant à mettre en œuvre la résolution 26/9 des Nations Unies, en élaborant un instrument juridiquement contraignant pour réglementer, dans le cadre du droit international des droits humains, les activités des sociétés transnationales et autres entreprises.

Les membres du Réseau-DESC ont noté des améliorations dans la version révisée du Projet de Traité qui reprennent certains des points soulevés dans les notes de position collectives (en anglais ici) que nous avons publiées l’année dernière en réponse au Projet zéro. Ces aspects incluent notamment l’amélioration des formulations concernant les zones touchées par le conflit, la protection des peuples autochtones et la protection des défenseurs des droits humains.

Parallèlement, les membres du Réseau-DESC ont identifié plusieurs manquements dans le Projet révisé qui doivent être résolus pour garantir une pleine protection des droits humains, y compris dans les domaines mentionnés ci-dessus. Certains de ces manquements constituent des lignes rouges, identifiées par les membres du Réseau-DESC, concernant 11 sujets clés dont le franchissement risquerait de porter atteinte aux objectifs et au but du Traité. A cette fin, le Réseau-DESC a élaboré une note de position qui propose des formulations alternatives visant à renforcer le respect, la protection, la réalisation et la promotion des droits humains en vertu de ce Traité.

Champ d’application du traité : Alors que l’élargissement du champ d’application constitue un développement important, il est essentiel de maintenir une attention particulière sur les sociétés transnationales opérant à travers des chaînes de valeur mondiales afin de garantir que le Traité révisé permet de tenir lesdites sociétés responsables au regard des violations ou abus des droits humains.

Défenseurs des droits humains : Le Traité doit garantir sa cohérence par rapport à la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme afin d’éviter des différences et de favoriser l’harmonisation avec l’esprit de la Déclaration et de garantir une protection maximale aux défenseurs.

Accès à l’information : Le Traité doit intégrer des garanties relatives à l’accès à l’information en faveur des victimes et personnes ou communautés concernées en vue de prévenir les abus et violations de la part des entreprises avant et pendant la conduite des activités des entreprises ainsi qu’au cours des procédures de recours.

Droits des peuples autochtones : Le Traité doit garantir le droit au « consentement libre, informé et préalable » (CLIP) des peuples autochtones. Le consentement au lieu de la simple consultation doit être conservé dans le Projet en tant que principe essentiel car il offre un niveau de protection plus large aux communautés marginalisées au-delà de la simple consultation. Il promeut dans le cadre du principe élargi du CLIP la protection des valeurs communautaires et l’établissement de consensus. Le consentement doit être continu – des informations devant être fournies à chaque étape du projet en vue du renouvellement du consentement.

Le Traité et la question du genre : Il est nécessaire d’adopter un prisme non-binaire sur le genre, les jeunes et les enfants et de l’intégrer dans l’ensemble du texte. De manière plus significative, le texte doit permettre la désignation d’experts sur la question du genre au sein du Comité qui supervise la mise en œuvre du Traité.

L’emprise des entreprises : Le Traité doit renforcer les dispositions relatives à la lutte contre l’emprise des entreprises (ou influence indue des entreprises). Il est essentiel de protéger l’intégrité de l’espace d’élaboration des politiques, ses participants et ses résultats par rapport aux intérêts de ces corporations – y compris par rapport à tout conflit d’intérêt potentiel, perçu ou réel. Il est impératif d’élaborer des mesures de bonne gouvernance permettant de se protéger par rapport à l’ingérence politique des entreprises au niveau national, international et intergouvernemental, dans le cadre des discussions relatives au contenu, aux négociations, à la mise en œuvre et à la supervision du Traité.

Zones touchées par le conflit : Pour garantir la prévention des abus et violations des droits humains commis dans le cadre des activités des entreprises et par les États dans les zones touchées par le conflit, ou dans les États fragiles ou sortant de conflits, il est nécessaire d’appliquer une diligence raisonnable renforcée obligatoire et d’y inclure l’obligation de ne pas poursuivre ou commencer des activités lorsqu’aucune diligence raisonnable ne peut garantir l’absence de complicité ou de contribution à des violations susceptibles, dans certains cas, de constituer des crimes internationaux. Il est également important d’introduire des mesures préventives plus urgentes et immédiates et des politiques de désinvestissement et de désengagement afin d’éviter la participation et / ou la contribution des entreprises à des violations des droits humains dans le cadre de leurs activités et de leurs relations.

Relation commerciale c. relation contractuelle : Le Traité doit garantir la responsabilité de la société mère au regard des actions des sociétés opérant dans sa chaîne de valeurs et d’approvisionnement qui sont des sociétés avec lesquelles elle a une relation commerciale qui peut être différente de la simple relation contractuelle avec la société mère.

La primauté des droits humains : Le Traité doit refléter la primauté des obligations relatives aux droits humains par rapport à celles découlant des accords bilatéraux ou multilatéraux de commerce, d’investissement ou autre. La référence aux accords économiques ou commerciaux est moins importante dans le Projet révisé et peut être davantage renforcée afin de garantir que les obligations relatives aux droits humains sont prioritaires par rapport aux accords de commerce.

Les entreprises publiques : Les États doivent prendre des mesures supplémentaires et appliquer une norme de diligence plus élevée en matière de prévention et de protection au regard des abus et violations liés aux entreprises publiques ou intervenant dans les domaines dans lesquels l’État est un acteur économique.

Les obligations extraterritoriales : Le Traité tirerait profit de la clarification des formulations concernant les obligations extraterritoriales des États et la responsabilité de l’État d’origine et de l’État d’accueil au regard de la réglementation relative aux activités des entreprises et de la reddition de comptes de la part des entités commerciales pour leurs activités constituant une violation ou atteinte aux droits humains. Par exemple, il est important de noter qu’il devrait explicitement mentionner la non applicabilité du concept de forum non conveniens pour les besoins de ce Traité.

 

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