Philippines: Meurtre du défenseur des droits humains Emerito Samarca

Le 1er septembre 2015, le défenseur des droits humains et directeur de l'initiative éducation du peuple Lumad, M. Emerito Samarca a été retrouvé mort dans une salle de classe de l'école qu'il dirigeait. Des sources locales ont indiqué à Front Line Defenders que selon elles, des membres du groupe paramilitaire "Magahat" sont responsables du meurtre.

Emerito Samarca était directeur d'Alternative Learning Center for Agricultural and Livelihood Development - ALCADEV (centre d'apprentissage alternatif pour le développement agricole et les moyens de subsistance), une école lancée de son propre chef pour le peuple indigène Lumad. L'école enseigne une éducation secondaire aux membres de la communauté autochtone, soutient le développement de leurs communautés et les sensibilise à diverses questions. Emerito Samarca travaillait pour ALCADEV depuis sa fondation en 2004 et en était devenu le directeur en 2012.

Tôt dans la matinée du 1er septembre 2015, le corps du défenseur, qui aurait été poignardé à mort, a été découvert à l'intérieur d'une salle de classe de l'école. Selon des sources locales, il aurait été tué par un groupe paramilitaire appelé milice Magahat qui, la nuit précédant le meurtre, avait ordonné au reste des employés, aux enseignants et aux étudiants de quitter la zone d'Han-ayan et de se rendre dans le village du Kilomètre 16, situé à trois kilomètres d'Han-ayan.

Deux jours avant le meurtre d'Emerito Samarca, les membres des forces d'État Magahat/Bagani et du 36e bataillon d'infanterie et un régiment des forces spéciales, avaient effectué une patrouille dans la zone, y compris au sein de l'école ALCADEV, du village d'Han-ayan et d'une autre école dirigée par le programme tribal philippin de Surigao del Sur (TRIFPSS). Ensuite, la milice Magahat, qui serait soutenue par les forces de l'État, ont prévenu le personnel et les étudiants de l'école ainsi que les membres de la communauté, que s'ils ne quittaient pas la zone dans les deux jours, ils massacreraient la communauté tout entière.

Le 31 août, la majorité du personnel d'ALCADEV et les habitants d'Han-ayan ont quitté le village et se sont rendus dans le village du Kilomètre 16. Plus tard dans la nuit, les membres de la milice Magahat ont fait un raid dans les maisons du kilomètre 16, forçant les habitants à se rendre dans le centre communautaire local. Pendant le raid, les paramilitaires ont confisqué les téléphones portables et les appareils photo appartenant aux habitants d'Han-ayan et du personnel d'ALCADEV.

Après le raid, le 1er septembre vers 4h du matin, environ à l'heure où Emerito Samarca aurait été tué, un grand nombre de ceux qui avaient fui Han-ayan ont été témoin du meurtre de Dionel Campos, président de Malahutayong Pakigbisog Alang Sa Sumusunod (MAPASU), une organisation qui milite contre les mines à grande échelle à Surigao del Sur et qui représente les populations indigènes. Son cousin, M. Bello Sinzo, a aussi été tué. Les miliciens Magahat ont exécuté les deux hommes devant des centaines d'habitants du village du Kilomètre 16, avant de quitter les lieux.

La situation des défenseurs des droits des populations indigènes aux Philippines continue à se dégrader, en particulier dans la région du Mindanao. Le 18 août 2015, des soldats de l'armée appartenant au 1er bataillon des forces spéciales ont tué cinq membres de l'association des fermiers de Manobo, une organisation locale de paysans Lumad.

Front Line Defenders condamne fermement le meurtre d'Emerito Samarca et des autres membres de la communauté autochtone Lumad. Front Line Defenders pense qu'Emerito Samarca a été particulièrement ciblé à cause de son travail pacifique en faveur des droits des populations indigènes.