Nigeria: arrêter les attaques contre les membres de la communauté Ogoni

La pétition en dessous est initiée par Movement for the Survival of the Ogoni People (MOSOP), un membre du Réseau-DESC, qui invite les membres du Réseau-DESC et le publique à ajouter leurs signatures à l'appui. 

Nous, soussignés les organisations de la société civile et les individus, sommes profondément préoccupés par les rapports récents sur la détérioration de la situation des droits humains en pays Ogoni, au Nigeria. Les rapports allèguent un traitement brutal contre des personnes de la communauté Ogoni et des menaces de mort contre des membres du Movement for the Survival of the Ogoni People (MOSOP) qui protestent de manière non violente contre la pose de pipelines dans certaines communautés Ogoni par Shell Petroleum Development Company (SPDC ), la filiale nigériane du géant pétrolier international, Royal Dutch Shell.

Les rapports qui nous sont parvenus indiquent que les membres de la communauté qui s'étaient rassemblés pour une manifestation pacifique le jeudi 26 octobre 2017 contre Shell en raison de la pose de pipelines par l'entreprise sur les terres Ogoni ont été violemment réprimés et des dizaines de personnes ont été battues. On nous dit que les forces de sécurité impliquées étaient une équipe combinée d'agents de sécurité armés issus de l'escouade spéciale anti-vol (SRAS - Special Anti-Robbery Squad) de MOPOL 56 de la police nigériane et des unités militaires ayant participé à la récente Opération Crocodile Smile de l'armée nigériane. Les journalistes couvrant l'événement auraient eu leurs caméras saisies et restituées uniquement après la suppression des photographies prises de la marche.

La marche pacifique écourtée devait avoir lieu à l'emplacement du pipeline à Nonwa, dans la zone du gouvernement local de Tai, dans le district d'Ogoni, dans l'État de Rivers, au Nigéria. La dispersion violente de cette marche de protestation viole les droits de réunion pacifique et de liberté d'expression qui sont garantis par le droit international relatif aux droits humains et protégés par la Constitution de 1999 de la République fédérale du Nigeria dans sa version modifiée.

Nous observons également qu'au cours des trois derniers mois, MOSOP a exigé à plusieurs reprises que Shell mène une étude d'impact environnemental (EIE) sur le projet de pipeline et entame une vaste discussion avec la communauté Ogoni se basant sur son droit à un consentement libre, préalable et éclairé (FPIC pour son sigle en anglais). Les manifestations d'août ont conduit à la suspension de la pose de pipelines dans la région de Gokana, sur les terres Ogoni. Cependant, les appels récents à la consultation et à l'évaluation ont été ignorés, et cette dernière tentative de construction de pipelines aurait été initiée sans informer ou consulter de manière significative les communautés locales.

L'effort actuel de poser des pipelines touche à une histoire particulièrement douloureuse et malheureuse pour le peuple Ogoni. Il s’agit là de la même mise en oeuvre de pose de pipeline sans consultation qui a conduit à des manifestations locales, à des victimes aux mains des forces de sécurité militaire et à une répression comprenant l'arrestation du président du MOSOP, Ken Saro-Wiwa, suite au célèbre incident de Wilbros en 1993.

La pose de pipelines reste directement liée à la torture et à l'exécution de Ken Saro-Wiwa, environnementaliste et défenseur des droits humains, et de huit autres activistes Ogoni à Port Harcourt (Nigéria) le 10 novembre 1995, suite à leurs efforts non violents de protéger les autochtones Ogoni des abus sur les droits humains et l’environnement associés à Shell et ses cohortes de l'industrie pétrolière dans le delta du Niger.

Par conséquent, nous prenons très au sérieux la répression actuelle et évitable contre la communauté et les menaces qui pèsent sur la vie des membres du MOSOP. Il est particulièrement préoccupant que les regains d’efforts relatifs à la pose de pipelines aient lieu à la veille de l'anniversaire de l'exécution du directeur antérieur du MOSOP.

Nous demandons au gouvernement du Nigéria ce qui suit:

  1. Mener une enquête immédiate et approfondie sur les agressions brutales des membres de la communauté Ogoni qui ont été attaqués par les militaires lors de l’interruption de la manifestation hier et assurer une peine appropriée pour toutes les personnes impliquées
  2. Ordonner à Shell et à ses sous-traitants de suspendre toutes les opérations de pipelines jusqu'à la réalisation d'une évaluation d'impact environnemental (EIE) qui prenne en considération les conditions socio-économiques des terres Ogoni en consultant le peuple Ogoni
  3. Veiller à ce que toutes les personnes blessées au cours de la manifestation écourtée par les agents de sécurité bénéficient d'un traitement médical approprié et d'une indemnisation
  4. Cesser immédiatement toutes attaques, harcèlement et perturbation des réunions des membres du MOSOP