Les membres réunis au Mexique élaborent un plan stratégique du projet de l’emprise des entreprises

Publish Date: 
Tuesday, 10 October, 2017

Du 29 au 31 août 2017, environ 25 membres du Réseau-DESC - mouvements sociaux et ONG du monde entier - se sont réunis à Mexico pour élaborer un plan stratégique pour les deux prochaines années du projet de l’emprise des entreprises du Groupe de travail sur la responsabilité des entreprises (GTRE).

La réunion a été guidée par les membres du groupe consultatif du projet de l’emprise des entreprises: Above Ground (Canada), PODER (Mexique), SiLNoRF (Sierra Leone), Defend Job (Philippines), CNS (Inde) et Habi Centre (Egypte), qui ont mené ce projet au cours des deux dernières années. Le premier jour, Francisco Rocael (Consejo de Pueblos Wuxhtaj, Guatemala), Président du Conseil du Réseau-DESC, a souligné l'importance de la réunion pour ce qui est de la nature mondiale de l’emprise des entreprises à laquelle sont confrontées les communautés de toutes les régions, qui ébranle le contrôle communautaire sur les ressources et l’intérêt public général.  Après avoir passé en revue les activités initiales et les résultats du projet, trois études de cas ont été partagées par des membres pour explorer la définition actuelle et les manifestations de l’emprise des entreprises décrites par le projet, à savoir celui de Mines Alerte Canada qui concentre son attention sur l’économie diplomatique, celui de SiLNoRF se concentrant sur la manipulation de la communauté et celui d’APRODEH s’intéressant à l’ingérence législative des compagnies d’extraction minière.  Deux autres cas, présentés par Terra de Direitos et CNS, ont mis en avant les efforts de la société civile pour faire face à l’emprise des entreprises, contestant les ingérences judiciaires dans le système judiciaire brésilien et bloquer l’implication des entreprises dans la politique de santé publique et les partenariats connexes par l'intermédiaire de la Convention-cadre pour la lutte antitabac.

Ce projet a émergé des discussions des membres lors de précédents forums des peuples sur les droits humains et les entreprises organisés par le Réseau DESC et a été concrétisé il y a deux ans lors d'une réunion stratégique initiale à Mexico, également co-organisée par PODER. Lors de cette réunion, le PAG a formulé une définition initiale: «L’emprise des entreprises fait référence aux moyens par lesquels une élite économique porte atteinte à l’environnement et à la mise en oeuvre des droits humains en exerçant une influence indue sur les institutions publiques et les décideurs nationaux et internationaux» et a aussi commencé à décrire ses manifestations spécifiques à partir de cas de membres et d'alliés, qui comprennent: la manipulation communautaire, la diplomatie économique, l'ingérence judiciaire, l'ingérence législative et politique, la privatisation des services de sécurité publique et les pratiques de porte tournante.

Lors des discussions de groupe, les participants ont approfondie l’analyse commune relative à l’emprise des entreprises et à ses diverses manifestations, par exemple attirer l’attention sur les projets de responsabilité sociale des entreprises comme moyen d'acquérir une «licence sociale pour fonctionner» grâce aux projets de développement communautaire, parfois en partenariat avec des ONG, offrant des avantages à court terme souvent pour masquer les inconvénients à long terme. Les membres ont également souligné la manipulation des médias par les entreprises, influençant les discours dominants de progrès et de développement, justifiant à la fois la privatisation des services publics essentiels et l'utilisation des ressources publiques - via des subventions ou des politiques fiscales, le soutien des agences de crédits à l'exportation ou d'autres formes de financements publics - pour promouvoir les intérêts privés des entreprises. Les membres ont également insisté sur le rôle des sociétés finançant les études et le monde académique de façon plus générale, ce qui a été identifié comme l’emprise par les entreprises de la science et des établissements d'enseignement public. En continuant à approfondir l'analyse collective, on a également reconnu la nécessité d'être attentif au contexte, en particulier pour les situations de zones de conflit et d'occupation.

L’emprise des entreprises a ensuite été identifiée comme l’une des conditions mondiales menaçant les communautés du monde entier dans la Charte commune de lutte collective, initialement développée par le Groupe de travail sur le mouvement social et affirmée par tous les membres présents lors de la réunion de stratégie globale de 2016 du Réseau-DESC. Cette réunion actuelle a défini la position du GTRE pour guider et contribuer aux actions à l'échelle du réseau afin de faire face à l’emprise des entreprises dans la période à venir, en s'assurant que les demandes, l'analyse et les récits des mouvements sociaux et des communautés sont au centre de la stratégie.

Au cours de la réunion de stratégie, les participants ont envisagé les principaux changements qu'ils souhaitent voir dans les années à venir. L'un des principaux objectifs est de pousser la société civile à faire face à l’emprise des entreprises et à exiger l'intérêt public, en faisant évoluer les discours publics au sens large et en dévoilant la véritable nature des entreprises, dont le but principal et le but ultime est le profit de certains sans la garantie des droits humains pour tous. Le deuxième jour, les membres se sont divisés en trois groupes pour approfondir l'analyse et commencer à étudier des réactions concrètes liées à la vulgarisation et au renforcement des alliances, à la documentation et à la mobilisation engagées par la communauté et à des modèles de réformes législatives et politiques. Le dernier jour, ces discussions ont abouti à l’élaboration d’un plaidoyer et d’une campagne coordonnés au cours des deux prochaines années. Des groupes de membres engagés dans un travail collectif sur cinq principaux domaines d'action: révision des manifestations de l’emprise des entreprises, affinement des analyses et demandes politiques, documentation des succès et des leçons tirées (y compris de nombreuses ayant émergé lors des réunions), des documents de communication populaires sur les manifestations, ainsi que des outils et des cours pour une documentation menée par la communauté. Les membres se sont également engagés à utiliser individuellement et collectivement une série d'opportunités et d'événements au cours de l'année à venir pour mettre en avant l’emprise des entreprises et préconiser des changements concrets. Par exemple, les membres prévoient des événements publics lors de la prochaine session du Groupe de travail intergouvernemental des Nations Unies dont le but est d'élaborer un traité sur les droits humains et les entreprises, ainsi que lors du Forum des Nations Unies sur les droits humains et les entreprises, en formulant une position commune de plaidoyer sur l’emprise des entreprises et le traité. Il y a aussi eu une forte pression pour renforcer la mobilisation et la campagne, par exemple en aidant les membres à soutenir et à sensibiliser à l'action de milliers de petits agriculteurs impliqués dans la West African Caravan on Land, Water & Seeds (Caravane de l'Afrique de l'Ouest pour les terres, l'eau et les semences). Cela a inclus une discussion sur la manière de faire progresser une campagne et une action à l'échelle du réseau, y compris via une journée mondiale d'action à la mi-2018.