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Mercredi, Juillet 10, 2024
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En tant que réseau de plus de 300 mouvements sociaux, organisations et défenseurs des droits humains de 80 pays, ESCR-Net – Réseau international pour les droits économiques, sociaux et culturels, est uni dans notre solidarité avec le peuple kenyan, qui a exercé ses droits humains à la liberté d’expression, d’association et de réunion, dénonçant le projet de loi de finances punitif de 2024, que le gouvernement a finalement été contraint de retirer fin juin. Leur participation massive aux manifestations illustre un engagement ferme à défendre les droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux (DESC), qui sont essentiels à la dignité humaine et à la justice sociale.

La répression violente récente des manifestations pacifiques constitue une grave violation du droit international des droits de l’homme et rappelle tragiquement l’histoire de la violence sanctionnée par l’État au Kenya. Les rapports faisant état de tirs de la police, de l’utilisation irresponsable et inappropriée de grandes quantités de gaz lacrymogène, d’enlèvements et du déploiement des Forces de défense du Kenya (KDF) sans informer pleinement le public de l’ampleur de la participation militaire et sans l’approbation de l’Assemblée nationale, en violation de l’article 241 (3) (c) de la Constitution du Kenya, sont profondément préoccupants. Les données de la Commission nationale des droits de l’homme du Kenya indiquent que 39 personnes sont mortes, 361 ont été blessées, 32 cas de disparitions forcées ou involontaires ont été signalés et 627 arrestations de manifestants ont eu lieu. Ces actions ne violent pas seulement les lois du Kenya, mais aussi les normes juridiques internationales, y compris le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et la Convention contre la torture.

Nous appelons le président Ruto à respecter les voix du peuple kényan et son droit à la réunion pacifique, comme le consacre la Charte des droits dans la Constitution du Kenya et le PIDCP. Le projet de loi de finances de 2024 menaçait de saper les droits économiques et sociaux des Kenyans, exacerbant les inégalités et les difficultés. Nous restons vigilants alors que le gouvernement envisage maintenant une série de mesures d’austérité. Les droits humains à un logement adéquat, à la santé, à l’éducation et à un niveau de vie adéquat doivent être protégés. Ces droits sont protégés par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), auquel le Kenya est partie.

Nous rappelons au président Ruto que tout pouvoir souverain appartient au peuple kényan et que son autorité est dérivée du peuple, par conséquent, le président et tous les fonctionnaires et institutions gouvernementales ont l’obligation de respecter, protéger et réaliser les droits humains et les droits constitutionnels connexes du peuple kenyan. Nous exprimons notre solidarité avec le mouvement de base croissant et profond pour les droits humains, qui est motivé par les demandes du peuple pour le bien-être, la dignité et la participation. Nous nous joignons à une partie croissante de la communauté internationale en solidarité avec le peuple kenyan dans sa lutte pour la justice et les droits humains.

De plus, nous reconnaissons le rôle important que jouent les institutions financières internationales, en particulier le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, dans la définition des politiques économiques au Kenya et dans d’autres pays du Sud global. Les dures conditions imposées par le FMI, qui ont été essayées et testées auparavant avec des résultats désastreux, ont influencé la rédaction du controversé projet de loi de finances de 2024, qui a provoqué l’indignation dans le pays. Les conditions de prêt, y compris les mesures d’austérité, promues par ces institutions continuent d’exacerber la pauvreté et les inégalités, de renforcer les structures néocoloniales et de saper la capacité du gouvernement kényan à respecter ses obligations en matière de droits humains. Les conditions attachées à l’aide financière conduisent souvent à des coupes dans les biens et services publics essentiels, ainsi qu’à des taxes régressives et à l’affaiblissement des réglementations du travail. Ces conditions affectent de manière disproportionnée les communautés déjà appauvries et marginalisées, et en particulier les femmes dans toute leur diversité au sein de ces communautés.

Conformément aux normes internationales des droits de l’homme, les membres d’ESCR-Net appellent le gouvernement kenyan à :

  • Cesser l’utilisation de la force excessive contre les manifestants pacifiques : les droits humains à la liberté d’expression, d’association et de réunion doivent être respectés et protégés.
  • Mener des enquêtes indépendantes et transparentes : enquêter à fond sur les meurtres, enlèvements et traitements cruels et dégradants signalés, et tenir les responsables pour responsables afin de garantir la justice et de prévenir de futures violations.
  • Mettre fin aux enlèvements de manifestants et libérer tous les enlevés sans condition : le droit à la liberté et à la sécurité de la personne, qui comprend le droit de ne pas être privé de liberté arbitrairement ou sans juste cause, doit être respecté et protégé.
  • Engager un dialogue significatif avec la société civile : aborder les préoccupations économiques et sociales de la population, en veillant à ce que toute politique économique respecte et promeuve les droits humains de tous les Kenyans.
  • Veiller à ce que toutes les agences de sécurité et les mesures de sécurité prises opèrent dans les limites de la loi : en conformité avec les ordres judiciaires, les forces de sécurité kényanes doivent respecter l’état de droit et respecter pleinement la démocratie, les droits humains et les libertés fondamentales.
  • Assurer la protection des défenseurs des droits humains : respecter les principes du droit international des droits de l’homme et fournir un environnement sûr pour ceux qui plaident pour la justice et les droits humains.

Nous nous joignons à de nombreux membres de la communauté internationale pour appeler le gouvernement kényan à respecter ses obligations en matière de droits humains et nous sommes en solidarité avec les efforts de la société civile kényane dans la défense de la justice et de la dignité pour tous.