Invoquant l’héritage de Thomas Sankara, les membres ont fermement condamné l’utilisation de la dette comme arme et comme outil politique et économique pour contrôler les pays pauvres et en développement du Sud. Comme l’a déclaré Mae Buenaventure de l’APMDD, « de nombreux pays du Sud sont soit confrontés à un surendettement, soit en crise, soit au moins au bord du défaut de paiement de leurs emprunts. Les taux d’intérêt élevés des prêts commerciaux accordés par les prêteurs ont contraint les pays à réduire drastiquement leurs dépenses publiques tout en se concentrant et en donnant la priorité au remboursement de la dette ».
Les membres ont tiré la sonnette d’alarme sur ce qu’ils considèrent comme la poursuite du colonialisme économique, de l’impérialisme et de la domination par un contrôle institutionnalisé des finances et des capitaux. Tel qu’il est actuellement conçu, le système financier mondial ne répondra jamais aux besoins urgents des pays historiquement spoliés, ni ne permettra la réalisation de la justice économique et environnementale. Les membres ont depuis longtemps établi que le système économique dominant, ancré dans le capitalisme néolibéral, privilégie les profits et profite aux individus, aux nations et aux entreprises riches au détriment des droits humains et du bien-être des populations.
Les banques de développement et le piège de la dette
Les banques multilatérales de développement, les banques régionales de développement, les banques publiques de développement et d’autres institutions financières mondiales alimentent un système financier extractif, inégalitaire et incompatible avec les besoins actuels des pays du Sud. Ces institutions et leurs politiques financières ont été stratégiquement mises en place pour perpétuer l’héritage colonial à travers de pratiques et de conditions financières injustes. Qu’il s’agisse de générer des dettes insoutenables par un financement excessif basé sur des prêts, d’imposer des conditions injustes, de donner la priorité aux remboursements ou de financer de fausses solutions climatiques impulsées par les entreprises à travers des prêts. En Asie, par exemple, la Banque asiatique de développement finance des projets d’énergie géothermique sous le couvert d’une transition juste qui, comme l’a souligné Titi Soentoro, ont « déplacé des communautés, endommagé l’environnement et alourdi le fardeau de la dette ».
Mais ce n’est pas seulement en Asie que l’on peut voir comment les banques de développement jouent un rôle majeur dans l’enfoncement des pays dans le piège de la dette. Dans toutes les régions, les BMD accordent des prêts pour financer de fausses solutions à la crise climatique, au nom du développement durable. Souvent, ces investissements ignorent les garanties en matière de droits humains, manquent de transparence et sont inconnus du public. Cependant, comme l’a indiqué Rosario Fassina de l’International Accountability Project, des outils tels que l’Energy Finance Tracker jouent un rôle essentiel pour mettre en évidence les contradictions des projets dits d’énergie verte, qui sont en grande partie générateurs de dettes : « Nous devons utiliser les outils disponibles, par exemple les mécanismes de réclamation, pour commencer à rappeler ces banques à l’ordre. »
Pour transformer véritablement l’architecture financière, les membres exigent l’annulation inconditionnelle des dettes illégitimes et coloniales. « Nous avons besoin d’un nouvel ordre économique et financier capable d’apporter des solutions financières et climatiques de manière urgente et durable », a souligné Shereen Talaat, de MENA-Fem. Nos économies doivent être fondées sur la solidarité et la bienveillance, comme l’affirme la Déclaration de Rabat récemment publiée, qui présente des alternatives à l’économie extractive.
L’annulation de la dette doit s’accompagner d’un cadre de justice réparatrice qui reconnaisse les responsabilités historiques des puissances coloniales et néocoloniales, ainsi que des institutions privées, qui doivent être traduites en justice pour leur contribution à la polycrise dette-soins-climat. Comme l’a souligné Catherine, du Forum et réseau africain sur la dette et le développement (AFRODAD), de nombreux pays fortement endettés ont hérité des obligations financières des régimes coloniaux et des réparations sont dues.
Former un front uni pour notre droit à l’avenir
Pour garantir le droit à l’avenir, nous devons continuer à nous organiser, à mener des campagnes et à relier les luttes de tous les peuples opprimés. Dans l’esprit de Sankara, nous devons reconstituer un front uni contre la dette, mené par les communautés en lutte qui détiennent les solutions nécessaires pour ramener une transformation profonde.
De Genève à Belém, ces luttes façonnent les processus mondiaux – des négociations sur le traité contraignant sur les droits humains et les entreprises à la COP30 et à l’embargo général sur l’énergie pour la Palestine – en unissant les revendications en matière de dette, de justice climatique et de responsabilité des entreprises.
En tant que Réseau-DESC, nous continuerons à faire campagne pour notre droit à l’avenir et nous invitons nos membres et alliés à se joindre à nous pour amplifier ces revendications afin de rendre justice aux personnes et à la planète.


