Summary
La municipalité de Chitungwiza (« municipalité ») compte de 400 000 à 650 000 habitants et comprend un bassin hydrographique constitué du Barrage Muda, des tributaires Seke/Havava, des cours d’eau de la rivière Nyatsime et des tributaires de la rivière Manyame.
L’alinéa 168 de la Loi sur les conseils urbains du Zimbabwe oblige les municipalités à fournir de l’eau potable aux résident-e-s et à assurer le traitement des eaux usées brutes produites dans leur juridiction. Il est de plus interdit aux municipalités zimbabwéennes de déverser, ou de permettre le déversement, de polluants dans l’environnement aquatique au titre de l’alinéa 57 de la Loi sur la gestion de l’environnement.
Depuis au moins 2013, la Municipalité a causé ou autorisé le déversement d’eaux usées brutes dans ses ruisseaux et sources d’eau potable et n’a pas assuré l’entretien de ses usines de traitement, mettant gravement en danger la population humaine et l’environnement aquatique. À deux reprises, en décembre 2011 et en juillet 2018, le Conseil de gestion de l’environnement, qui relève de l’Agence de gestion de l’environnement (« Agence »), a reconnu la Municipalité coupable du déversement d’eaux usées brutes dans l’environnement et lui a ordonné de cesser son activité illégale. En mai 2019, des inspections menées par l’Agence ont révélé que la Municipalité continuait à déverser des eaux usées dans l’environnement aquatique à des points de déversement non déclarés en violation de l’alinéa § 5(1) de la règlementation de la gestion de l’environnement : élimination des effluents et des déchets solides. Les inspections ont également révélé que la Municipalité avait manqué à son devoir de mettre en place des sites de cueillette des déchets, de désaffecter des sites non délimités de décharge de déchets solides et de construire un site d’enfouissement. La Municipalité a reçu une amende de 5,000 $ et l’ordre de réparer les sites touchés.
La non-adoption par la Municipalité des mesures correctives prescrites continue de poser des risques graves pour la santé et la sécurité. La zone municipale de Chitungwiza est reliée à d’autres zones par la confluence de cours d’eau, polluant les eaux bien au-delà de la municipalité elle-même. Dans le contexte des changements climatiques et de la raréfaction des ressources en eau, la pollution de l’eau impose l’emploi d’eau contaminée et empêche l’atténuation des effets néfastes des sécheresses dans l’économie agricole. Sans la mise en place de mesures correctives, la qualité de l’eau continue à poser des risques pour la santé et la sécurité de la population humaine, notamment une augmentation du risque de choléra, de typhoïde et de dysenterie, et entraîne la destruction des plantes indigènes et de la faune sauvage.
En conséquence, en juin 2020, la Zimbabwe Environmental Law Association (ZELA) a engagé une action contre la Municipalité et l’Agence devant la Haute Cour du Zimbabwe pour le déversement illégal d’eaux usées non traitées dans l’environnement aquatique et les sources d’eau de Chitungwiza. La ZELA a demandé une injonction prohibitive visant à interdire à la Municipalité de déverser des eaux usées brutes dans l’environnement et une injonction mandatoire visant à ordonner à la Municipalité de réparer ou de mettre à niveau ses usines de traitement des eaux et ses systèmes d’égouts afin d’assurer un traitement approprié des eaux usées avant le déversement.
La ZELA a affirmé que la Municipalité, en n’assurant pas le traitement et l’élimination appropriés des eaux usées, contrevient à la Loi et à la Règlementation relatives à la gestion de l’environnement, à la Loi sur les conseils urbains et à la Constitution du Zimbabwe. L’alinéa 731(1)(a) de la Constitution garantit à toute personne le droit à un environnement sans danger pour sa santé et son bien-être. Ce droit est réaffirmé par l’alinéa (4)(1) de la Loi sur la gestion de l’environnement, qui oblige tous les organismes gouvernementaux à prévenir ou réduire au minimum les impacts négatifs sur l’environnement et l’alinéa (4)(2)(g), qui oblige toute partie responsable de la dégradation de l’environnement à remédier à cette dégradation et aux effets négatifs sur la santé qui en résultent. De plus, l’alinéa 77(1)(a) de la Constitution garantit le droit à une eau saine et propre. L’alinéa 57 de la Loi sur la gestion de l‘environnement réaffirme ce droit en pénalisant le déversement de polluants et de substances dangereuses dans l’environnement aquatique et en obligeant la partie fautive à assumer le coût de l’élimination des déchets et de la remise en état de l’environnement.
Le 16 décembre 2020, la Haute Cour a (1) interdit à la Municipalité de déverser des eaux usées non traitées dans l’environnement, (2) ordonné à la Municipalité de réparer ou mettre à niveau ses usines de traitement des eaux et systèmes d’égouts afin d’assurer un traitement approprié des eaux usées avant le déversement dans les trois mois suivant l’ordonnance, (3) ordonné à l’Agence de mener, dans les trois mois suivant l’ordonnance, une inspection visant à évaluer la conformité avec la Loi sur la gestion de l’environnement et de présenter un rapport d’inspection au greffier de la Haute Cour, et (4) ordonné à la Municipalité d’assumer les frais du procès sur la base des honoraires réclamés par un avocat à son client.