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Vendredi, Avril 23, 2021
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Nature of the Case

Lorsque Rick Desautel, citoyen américain, membre de la tribu des Lacs et appartenant au peuple Sinixt, a abattu un wapiti au Canada, il a été poursuivi par le gouvernement provincial pour avoir contrevenu à la législation locale sur la faune. En guise de défense, il a invoqué ses droits ancestraux de chasse protégés par l’article 35(1) de la Loi constitutionnelle. La Cour suprême du Canada lui a donné raison, reconnaissant son droit ancestral de chasser sur le territoire canadien. Elle a également statué que la protection constitutionnelle des droits ancestraux s’applique aux peuples autochtones non résidents, dès lors qu’ils sont les descendants de communautés autochtones ayant occupé le territoire canadien au moment du premier contact avec les Européens.

Summary

En 2010, Richard Lee Desautel, un citoyen américain, a abattu un wapiti en Colombie-Britannique, en violation d’une loi provinciale sur la faune, et a été poursuivi par le gouvernement canadien. M. Desautel est membre de la tribu des Lacs des tribus confédérées Colville des États-Unis. Le juge de première instance a conclu que la tribu des Lacs est un groupe moderne successeur du peuple Sinixt qui était présent au Canada à l’époque du contact avec les Européens. Les Sinixt chassaient autrefois sur des terres situées dans l’actuelle Colombie-Britannique, et M. Desautel a abattu le wapiti sur des terres situées sur le territoire ancestral des Sinixt. M. Desautel a invoqué une défense affirmative fondée sur la Constitution, soutenant que son droit de chasser sur le territoire ancestral de son peuple, situé en Colombie-Britannique, est protégé en tant que droit ancestral au sens de l’article 35.

La Cour suprême du Canada devait examiner deux questions dans cette affaire. Tout d’abord, la Cour devait déterminer si les personnes qui ne sont pas des citoyens ou des résidents du Canada peuvent exercer les droits protégés par l’article 35(1) de la Loi constitutionnelle, l’article qui protège les droits des peuples autochtones du Canada. Deuxièmement, la Cour devait déterminer si les actions de M. Desautel satisfaisaient au critère établi dans l’arrêt Van der Peet, lequel sert à évaluer l’existence d’un droit ancestral protégé par la Constitution.

L’article 35(1) de la Loi constitutionnelle stipule : « Les droits existants – ancestraux ou issus de traités – des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés. » La Cour a examiné la question de savoir si un groupe de personnes qui ne sont pas des résidents canadiens ou des citoyens canadiens peut néanmoins être considéré comme un « peuple autochtone du Canada ». La Cour a conclu que l’expression « peuples autochtones du Canada » inclut les communautés autochtones contemporaines qui sont les descendantes des sociétés autochtones occupant le territoire canadien au moment de l’arrivée des Européens. Il en découle que les membres de ces communautés, même s’ils ne sont ni citoyens ni résidents du Canada, peuvent être reconnus comme faisant partie des peuples autochtones du Canada.

Ensuite, la Cour s’est penchée sur la question de savoir si M. Desautel avait un droit ancestral en vertu du critère Van der Peet. Le critère Van der Peet permet de déterminer si un droit ancestral existe en caractérisant le droit revendiqué dans les actes de procédure, en déterminant si le demandeur a prouvé qu’une pratique existait avant le contact avec les Européens, puis en établissant si le droit a une continuité avec la pratique antérieure au contact avec les Européens. En première instance, le juge avait estimé qu’à l’époque du contact avec les Européens, la chasse à des fins alimentaires faisait partie intégrante de la culture distinctive des Sinixt et que la pratique contemporaine de la chasse dans cette région avait une continuité avec la pratique antérieure au contact avec les Européens. La Cour a convenu avec le juge du tribunal de première instance que le droit de M. Desautel de chasser pour se nourrir à des fins sociales et cérémonielles était un droit ancestral protégé par le paragraphe 35 (1).

Dans son appel devant la Cour suprême du Canada, le gouvernement canadien a avancé plusieurs arguments. Il a d’abord soutenu que toute reconnaissance d’un droit de franchir la frontière entre les États-Unis et le Canada soulèverait des enjeux de souveraineté, et qu’un tel droit serait incompatible avec l’exercice de cette souveraineté, ce qui en interdirait la reconnaissance. La Cour a rejeté cet argument car M. Desautel avait franchi la frontière canadienne en toute légalité, de sorte que le franchissement de la frontière n’était pas en cause dans cette affaire. Le gouvernement canadien a également fait valoir que l’article 35, paragraphe 1, exige que les peuples autochtones aient une communauté contemporaine dans la région où un droit ancestral est revendiqué. La Cour a également rejeté cet argument, déclarant que la présence continue sur le territoire n’a jamais fait partie du critère d’un droit ancestral.

Enforcement of the Decision and Outcomes

À la suite de cette décision, M. Desautel n’est pas coupable des infractions à la Loi sur la faune dont il était accusé. L’affaire soulève des implications plus larges, notamment quant à l’obligation de la Couronne de consulter et, le cas échéant, d’accommoder le peuple Sinixt résidant aux États-Unis, en raison des droits ancestraux qu’il revendique sur son territoire traditionnel situé au Canada.

Significance of the Case

Cette affaire constitue une étape importante vers la réconciliation entre la souveraineté de la Couronne sur le territoire canadien actuel et l’occupation antérieure de ce territoire par les sociétés tribales autochtones avant l’arrivée des Européens. Cette affaire montre que l’on reconnaît que le déplacement forcé de tribus par les colons européens n’invalide pas les droits ancestraux que ces communautés détiennent sur leur territoire traditionnel et ouvre la voie aux membres des tribus autochtones déplacées dans le passé pour entreprendre des activités traditionnelles sur leurs terres ancestrales.

L’affaire apporte également un éclairage précieux sur la notion de continuité des droits ancestraux, en précisant que les pratiques n’ont pas besoin d’avoir été exercées de façon ininterrompue, pourvu qu’un lien puisse être établi entre les pratiques antérieures et postérieures au contact avec les Européens. Toutefois, elle laisse en suspens plusieurs questions importantes, notamment la manière dont l’obligation de consultation s’appliquera aux communautés autochtones non résidentes, la possibilité de justifier certaines atteintes aux droits de ces non-résidents, les restrictions potentielles au franchissement des frontières, ainsi que l’application éventuelle du critère du titre autochtone aux communautés vivant à l’extérieur du Canada.

Nous remercions particulièrement de ses contributions le membre du Réseau DESC : Program on Human Rights and the Global Economy at Northeastern University (PHRGE).

Ruling