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Mercredi, Mai 8, 2024
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Dans la semaine du 11 au 22 mars, les membres du groupe de travail sur les Femmes et les DECS du Réseau ESCR-Net se sont réunis à New York pour participer à la 68e Commission sur le statut de la femme (CSW68). Tout au long de la semaine, le GT a coordonné une série d’événements et de réunions stratégiques, mené des entretiens vidéo avec les membres et participé à plusieurs activités communes avec plus de 20 membres du GT présents.

Petit dejeuner de travail

Le mardi 12 mars, le groupe de travail sur les femmes et les DESC s’est réuni autour d’un petit-déjeuner de travail afin de renouer contact en tant que groupe, discuter et partager des messages et des réflexions sur la CSW68. Cette 68eme session était la première en mode entièrement présentiel depuis 2020 et marque le début d’une série de plusieurs forums régionaux et mondiaux y compris entre autres les réunions du Groupe de la Banque mondiale et du Fond monétaire international prévues pour Avril, la Conférence internationale de l’OIT en juin, le Sommet du futur en Septembre, la 10e session du Traité contraignant et la route vers Pékin+30 en 2025. Le petit-déjeuner fut une occasion de se retrouver et de convenir d’éventuelles actions communes dans cet espace.

La CSW soit l’occasion pour nous de recouvrer notre pouvoir féministe et de dénoncer les discours capitalistes et néolibéraux ainsi que les solutions fallacieuses autour de la pauvreté, du développement et du financement.
— Sanyu Awori (AWID)
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La 68eme session de la CSW cette année fut particulièrement considérable ayant regroupé plus de 100 dirigeants mondiaux et 4 800 représentants d’organisations de la société civile, nombre constituant la deuxième plus forte participation dans les records de la CSW. D’une part, certaines organisations membres apprécient que la CSW « soit l’occasion pour nous de recouvrer notre pouvoir féministe et de dénoncer les discours capitalistes et néolibéraux ainsi que les solutions fallacieuses autour de la pauvreté, du développement et du financement » comme l’a formulé Sanyu Awori de l’AWID. D’autres se réjouissent de l’opportunité de s’associer à un mouvement féministe transnational mondial ; selon les propos de Norma Palacios, membre du syndicat des travailleurs domestiques SINACTRAHO (Mexique) « nous avons confirmé un scénario mondial où, du Mexique jusqu’au reste du monde, les femmes sont les plus touchées par la pauvreté, les inégalités et la violence ».

Les organisations membres suivantes étaient présentes a la réunion: Asia Pacific Forum on Women Law and Development APWLD; Asian Peoples’ Movement on Debt and Development, APMDD, Association for Women’s Rights in Development, AWID, Center for Economic and Social Rights, CESR, Franciscans International, Fida Uganda, Instituto de Liderazgo Simone Beauvior ILSB, International Women’s Rights Action Watch Asia Pacific IWRAW AP, Mena Fem, Sindicato de Obreros Curtidores de la República Argentina, SOCRA, Sindicato de Trabajadoras y Trabajadores del Hogar, Sinactraho, The Global Initiative for Economic Social and Cultural Rights GI ESCR et Mela Chiponda.

Manifestations parallèles à la 68eme session de la CSW

Le 11 mars, un groupe de membres et d’alliés du réseau DESC\ESCR-Net ont accueilli un événement parallèle autour du thème « Rétablir l’organisation sociale des soins : une clé pour éradiquer la pauvreté des femmes » dont l’objectif était de débattre de la primordialité du travail décent des procureurs de soins ainsi que de la responsabilité publique des Etats dans le financement, la réglementation et la provision de services et de systèmes publics de soins. Le panel fit suite aux efforts collectifs des années précédentes, où un groupe d’organisations (mouvements féministes, syndicaux, mouvements pour la justice fiscale et les droits de l’homme) avaient lancé des initiatives complémentaires, telles que notamment le Manifeste People over Profit pour rétablir l’organisation sociale des soins, comme issue alternative de la crise mondiale des soins déclenchée par la pandémie du COVID-19. En 2022, le Réseau-DESC a déclaré qu’un nouveau pacte social sur les soins s’avérait urgent et en 2023, l’IDWF faisait partie du Manifeste de l’AWID Pas d’économies de soins sans travailleurs domestiques. Initiatives ayant largement convenu de la primordialité du travail décent pour les procureurs de soins et le responsabilité publique des États dans le financement, la réglementation et la fourniture de services et de systèmes publics de soins.

Aujourd’hui, la gouvernance mondiale est destinée à lutter contre la pauvreté, renforcer les institutions et le financement sensibles au genre lors de la 68e session de la CSW. Il serait impossible de parler de la pauvreté des femmes et de son éradication sans évoquer l’organisation sociale injuste des soins dans des sociétés fondées sur le pouvoir à trait colonial et l’intersectionnalité quant au travail des femmes. De même, il serait illusoire de parler des soins comme d’un bien commun et public au service de la société, sans reconnaître la tendance actuelle à leur objectification, leur monétisation, leur financiarisation et leur privatisation. Ces tendances visent à transformer les soins en un bien lucratif d’intérêt privé, et sont facilitées par l’emprise des compagnies sur les États au profit de l’accumulation capitaliste.

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Selon une étude de Juan Pablo Bohoslavsky et Lena Lavinas intitulée « l’égalité des genres (our Gender Bonds) : optimisation ou menace pour les Droits de la Femme ? » et présentée lors de la réunion d’experts précédant la 68eme session de la UNCSW, la tendance à la financiarisation est désormais confirmée et cette forme d’égalité dépendrait d’un mécanisme dit de dette souveraine, dans lequel le financement des politiques d’égalité des sexes et des soins serait dictée par l’emprise sur les gouvernements concernés.

Dans ce contexte, PSI, DAWN, ActionAid, OXFAM, CESR, GI-ESCR, GATJ, TJN, Womankind, FEMNET, IDWF et le réseau ESCR-Net ont lancé un appel joint défiant les gouvernements à révéler les forces et les intérêts privés sous-tendant le financement des politiques relatives à l’égalité des sexes et aux soins et forçant la privatisation, et à décrire la meilleure approche – fondée sur les obligations – du système économique international capable de garantir et concrétiser le droit humain aux soins, et montrer comment une coopération fiscale mondiale inclusive et plus démocratique pourrait contribuer à la réalisation des droits des femmes à tous les niveaux en plus d’intégrer des politiques centrées sur les soins dans l’action climatique.

Prenant la parole dans ce panel, Norma Palacio de SINACTRAHO affirme que la CSW est un espace de partage des réalités des travailleurs informels et domestiques et souligne que les systèmes de soins publics de qualité qui transforment la perspective de genre et la protection sociale sont des moteurs du changement économique véritable par rapport aux femmes. Elle appelle à une plus grande représentation des travailleuses domestiques dans les initiatives de plaidoyer afin qu’elles puissent avant tout exiger que les soignantes rémunérées et non rémunérées et les réseaux de soins communautaires soient représentés de manière significative dans la gouvernance des soins. Norma a appelé à plus de transparence et de responsabilisation dans la provision de soins publics et privés et, plus important encore, à faire de l’économie une économie de soins. Il est urgent de promouvoir une transition vers une économie régénératrice garantissant les soins et l’égalité matérielle, priorisant les droits de l’homme et à la durabilité, et d’investir dans la reproduction sociale, en élargissant la provision et l’accès à des services publics de qualité tout en luttant contre la privatisation.

“Défier le pouvoir des entreprises pour réduire la pauvreté et promouvoir les Droits de l’Homme »

Le 13 mars, les membres ont participé à l’événement intitulé : Défier le pouvoir des entreprises pour réduire la pauvreté et promouvoir les droits de l’homme. Le panel était co-organisé par l’AWID, le réseau ESCR Net, Franciscan International et Womankind Worldwide dans le cadre de l’Alliance féministe pour un traité contraignant. Les pratiques commerciales nocives affectent de manière disproportionnée les femmes et les personnes de genre divers. Ces pratiques provoquent et exacerbent les injustices environnementales et économiques et exposent les communautés au déplacement et à la violence, compromettant des décennies de progrès en matière d’égalité des sexes. Le plus inquiétant encore est le fait que les entreprises sont également légitimées en tant que parties prenantes principales dans tous les espaces des Nations Unies. Toutefois, en l’absence de règles contraignantes et strictes pour obliger les entreprises à rendre des comptes, une approche dirigée par le secteur privé ne fera qu’aggraver et approfondir les inégalités entre les sexes.

Aujourd’hui, ceux qui se doivent de défendre la paix et l’intégration sont les premiers responsables des discours de haine contre les femmes et la diversité sexuelle.
— Claudia Lazzaro (SOCRA, Argentine)

Cet événement parallèle a permis de partager des études de cas illustrant comment le pouvoir des entreprises affecte les femmes sur le terrain – en particulier les femmes défenseures des droits humains – et a appelé les mouvements féministes à exercer plus de pression pour la mise en place d’un cadre international clair et complet basé sur les droits humains pour la responsabilisation des entreprises, y compris un traité international contraignant sur les droits de l’homme et les entreprises.

L’événement, a regroupé plus de 100 personnes et fut une occasion pour illustrer le réel impact du pouvoir des entreprises sur les femmes – en particulier les femmes défenseures des droits humains – et pour informer les mouvements féministes sur le moyen de s’impliquer dans le traité contraignant des Nations Unies pour réglementer les entreprises transnationales, tel étant l’une des stratégies vers la responsabilisation des entreprises.

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L’événement a commencé par un mot de bienvenue de la co-animatrice féministe panafricaine Wangari Kinoti d’Action Aid International, suivi d’une intervention de Vivi Restuviani d’IWRAW Asie-Pacifique d’Indonésie sur certaines perspectives d’Asie quant à l’emprise des compagnies privées et la façon dont elle se manifeste dans la région suivies d’une étude de cas concrète de la région montrant les impacts négatifs auxquels sont confrontées les communautés, en particulier les femmes et les groupes de genre divers. Kifaya Khraim du Centre Women’s Center for Legal Aid and Counseling, Palestine a ensuite relaté le contexte du conflit, en mettant un accent particulier sur la documentation des colonies israéliennes et le transfert forcé de Palestiniens. Maureen Olyaro, de FEMNET, a également pris la parole pour évoquer le comportement irresponsable des entreprises dans l’élaboration de politiques commerciale en se basant sur les recherches de FEMNET autour de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), et enfin Claudia Lazzaro de SOCRA Argentine a rappelé des défis liés à la promotion de l’égalité des sexes dans le contexte de la recrudescence actuelle de l’emprise des compagnies privées sur l’État argentin.

Nous soulignons ici quelques-unes des réflexions de Claudia Lázzaro d’Argentine, syndicaliste du Sindicato Obreros Curtidores de la República Argentina, SOCRA, membre du Réseau-DESC:

Claudia nous invite à réfléchir à partir d’une perspective historique, en rappelant de la responsabilité des entreprises dans les crimes contre l’humanité commis en Argentine sous la dictature civile-militaire (1976-1983). Elle déclare : « l’emprise des entreprises sur l’État en Argentine n’est pas nouvelle, il existe des rapports officiels qui prouvent la participation des entreprises à la répression, aux enlèvements et à la disparition de travailleurs. Des enquêtes sur des entreprises telles que Ford, Mercedes Benz et Molinos Río de la Plata ont été menées dans les années 1980 et ont même abouti à des décisions judiciaires en 2002.

A l’occasion du 41e anniversaire du rétablissement de la démocratie en Argentine, plusieurs mesures ont été prises pour identifier et juger les auteurs du terrorisme d’État. Lazzaro prévient de la nécessité d’évaluer politiquement la mainmise croissante des entreprises sur l’État et de comprendre les effets de cette emprise sur l’application des droits humains et environnementaux, et souligne l’urgence de documenter les différentes manifestations d’influence sur les décideurs politiques nationaux et internationaux ainsi que sur les établissements publics.

Claudia a présenté plusieurs exemples d’ingérence des responsables officiels dans les secteurs de l’énergie, de l’industrie, des communications et de la santé. « Ce n’est pas par hasard que les gouvernements néolibéraux, par l’intermédiaire du lobby des affaires, exploitent les travailleurs, leur corps, leur bien-être et leur santé. Il y a des responsables à la tête du secteur de la santé publique qui sont affiliés à de principaux groupes d’entreprises du marché de la santé et qui plaident en faveur d’une réduction des investissements dans la santé publique et du conditionnement des syndiquées afin de resserrer l’étau autour des travailleurs bénéficiant de la sécurité sociale en Argentine – indispensable pour accéder aux prestations de santé.

Dans sa présentation, Claudia a invité les organisations de femmes et le mouvement féministe à se rallier au mouvement mondial qui appelle à la responsabilisation des entreprises, dénonce et documente les expressions de l’emprise des compagnies normalisant les transactions entre l’État et les entreprises, et met en garde contre les actions favorisant l’exclusion de l’agenda de l’égalité des sexes et s’attelant contre les acquis du mouvement féministe.

Elle décrit la situation récente en Argentine où le nouveau gouvernement désavoue toujours l’existence d’un écart salarial entre les sexes – bien que les statistiques officielles l’évaluent à 25% – a rétrogradé le ministère de la Femme, du Genre et de la Diversité au rang de sous-secrétariat et a récemment annoncé des mesures interdisant le langage inclusif et tout ce qui a rapport avec la dimension du genre. « Il serait urgent – selon Claudia – que cette CSW 68, qui appelle à redoubler les financements des politiques d’égalité femmes-hommes, dénonce la façon dont nos Etats honorent leurs engagements internationaux contre les violences faites aux femmes. Aujourd’hui, ceux qui se doivent de défendre la paix et l’intégration sont les premiers responsables des discours de haine contre les femmes et la diversité sexuelle, manifestent contre le droit égal au mariage, contre la loi sur l’accès à l’avortement sûr et gratuit et plaident en faveur des coupes budgétaires dans le programme Acompañar – qui cherche à renforcer l’autonomie financière des femmes et de la communauté LGBTI+ se trouvant dans des situations de violence basée sur le genre – ainsi que le programme Alimentar – qui avance un appui économique”.

Dans la séance de clôture, les panélistes ont réitéré les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui dans tous les contextes : de la faim, à la pauvreté, aux inégalités, à la violence envers les corps et les territoires, aux intersections entre les crises climatique, financière, économique et de soins, à l’exploitation des ressources naturelles, aux conflits armés, l’endettement public, le rétrécissement de la sphère publique et l’érosion des démocraties. Ce contexte fait de la réponse collective une urgence, déclare Claudia. Le mouvement des femmes, les groupes LGBT et les femmes noires d’Argentine dénoncent l’écart salarial, la féminisation de la pauvreté laissant les femmes et les divers genres 30% plus pauvres ; les programmes d’emploi pour les travailleurs domestiques qui ont été annulés laissent ces populations sans accès à la santé et à la sécurité sociale et en conséquence plus de 43000 femmes et personnes LGBT victimes de violence attendent aujourd’hui de recevoir une subvention pour l’assistance en cas de violence basée sur le genre.

Selon les rapports du CELS, plusieurs politiques de renforcement, d’assistance et de réparation adressées aux femmes et aux genres divers ont été mises en suspens ; sur 43 politiques de soins, 21 ont déjà été suspendues en raison de révocation ou de sous-exécution totale, 15 politiques sont en voie de suspension en raison de l’inaction ou du manque d’information, et seules 7 politiques restent en vigueur.

Finalement, Claudia propose de commencer à parler de richesse, de nommer les élites économiques qui détiennent la richesse dans le monde et de taxer les riches afin que la justice sociale et l’équité de genre soit effectives et se matérialisent. Nos luttes doivent être des luttes collectives qui ne nous désarment pas ; nous l’avons bien dit, le patriarcat s’effondrera, et pour que cela se produise, nous devons être unis dans une action latino-américaine et mondiale.

L’événement a culminé sur un appel à participer au mouvement mondial en faveur d’un traité des Nations Unies basé sur les Droits de l’Homme et à caractère juridiquement contraignant pour les entreprises transnationales et en particulier à se rallier aux Féministes dans leur action pour un traité contraignant (F4BT). Il s’agit d’une coalition de plus de trente organisations de défense des droits humains représentant un réseau mondial vaste et diversifié d’expériences de vie de femmes, d’analyses et d’expertise partagées. La coalition travaille collectivement depuis 2016 pour promouvoir un traité sensible au genre qui puisse adresser les obstacles structurels et responsabiliser les entreprises et pour mettre en place des mesures pour un changement constructif.