Summary
Le conseil métropolitain de Sandwell a élaboré un nouveau plan fiscal suite à une modification de la loi fiscale nationale. Auparavant, les personnes à faibles revenus recevaient une aide financière pour payer les taxes municipales, mais le nouveau plan instituait un allègement fiscal pour les particuliers en fonction de leur situation financière. La loi en question stipulait que les autorités locales établiraient un plan adapté au contexte local pour déterminer l’allègement fiscal en créant des catégories tenant compte du revenu, du capital et du nombre de personnes à charge. Le plan devait être publié à titre de projet et l’autorité locale était tenue de consulter les parties concernées. Le conseil de Sandwell a élaboré un projet de plan, qui n'incluait pas la condition de résidence, et a organisé une consultation publique. C'est pendant la dernière audience devant le conseil plénier qu'un membre a proposé une condition de résidence de deux ans afin de dissuader les particuliers de partir des zones où la valeur des propriétés est élevée pour aller dans des zones où les propriétés sont de moindre valeur afin d’alléger leur charge fiscale. La mesure a été adoptée sans grande discussion et sans aucune consultation publique. Avant l’introduction de l’action en justice, 3,600 personnes s’étaient vu refuser une réduction des taxes car elles ne satisfaisaient pas à la condition de résidence.
La condition de résidence a été contestée par trois femmes. L’une des femmes, Sheila Winder, début de la cinquantaine, est née à Sandwell et y a vécu la majeure partie des 46 premières années de sa vie. En 2008, elle a été forcée de déménager dans la localité de Dudley située à quelques kilomètres, car elle était victime de violence familiale. Elle est finalement devenue sans abri et a été logée par le conseil de Dudley dans un foyer réservé aux femmes à Sandwell. Les deux autres femmes ont aussi vécu à Sandwell la majeure partie de leur vie, mais pas pendant les deux ans précédant l’adoption du plan fiscal, l’une étant en situation de logement instable en raison de la détérioration de sa santé mentale et l'autre ayant récemment perdu son mari. Chacune des femmes disposait de revenus extrêmement limités, mais s’était vu refuser l’octroi d’un allègement fiscal en raison de la condition de résidence. Elles ont fait valoir que la condition ne répondait pas aux objectifs légitimes de la loi, et également, qu’elle était absurde et entraînait une discrimination indirecte à l’égard des femmes victimes de violence et des ressortissants et réfugiés de pays non européens (conformément au droit de l’Union européenne, section 19 de la Loi sur l’égalité et article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et de son premier protocole).
La Cour a souscrit à l'opinion des femmes selon laquelle la loi stipule clairement que des catégories doivent être définies en fonction des besoins financiers, et que les organes publics qui définissent les catégories sont liés par la loi. Il n’était pas légitime que le Conseil impose une condition de résidence pour éviter d’aider financièrement des personnes admissibles à un allègement fiscal. La condition de résidence ne correspondait pas à l’intention de l’assemblée législative, qui était manifestement de venir en aide à ceux et celles qui en avaient le plus besoin. Elle pourrait pousser les gens à opter pour les prestations sociales plutôt que de s’en aller, ce qui pourrait affecter tout particulièrement les personnes vulnérables, telles que celles qui fuient la violence familiale. La Cour a signalé que le problème pourrait s’aggraver si d‘autres autorités adoptaient une condition de résidence de même nature. La Cour a également statué que l’absence de consultation rendait illégale la procédure ayant mené à l'adoption de la condition de résidence. S’agissant de la discrimination, la Cour a conclu, entre autres, que la condition de résidence était indirectement discriminatoire à l’égard des femmes, parce que les femmes sont beaucoup plus susceptibles que les hommes d’être victimes de violence familiale, ce qui pourrait les obliger à fuir vers une localité différente, que les personnes qui s'enfuient ont souvent des ressources très limitées et qu’une personne fuyant vers Sandwell ne remplirait pas la condition de résidence.
De plus, la condition était illégale car rien ne permettait de prouver que même une seule personne était déménagée pour profiter de meilleurs avantages fiscaux, et la condition avait été adoptée sans véritable débat et sans tenir compte des conséquences.