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Nature of the Case

Une formation de deux juges de la Cour suprême de l’Inde a annulé une décision frivole qui octroyait unilatéralement un terrain forestier depuis longtemps protégé dans l’état de Telangana à un plaignant qui n’avait jamais détenu de titre de propriété sur ce terrain. Dans une décision cinglante, la Cour a invoqué une mauvaise application du critère d’examen approprié, une conclusion selon laquelle les « nouveaux éléments de preuve » étaient fondés sur des enquêtes foncières irrégulières et une riche histoire de l’obligation constitutionnelle positive de l’Inde en matière de conservation des zones forestières.

Summary

Le plaignant Mohd. Abdul Qasim a revendiqué la propriété d’une terre forestière à Kompally, banlieue de Hyderabad dans l’État de Telangana, invoquant une erreur dans le relevé initial du terrain effectué en 1950. La Haute Cour de justice de Hyderabad pour l’état de Telangana a rejeté la requête du plaignant en 2018 au motif qu’il n’avait pas prouvé qu’il avait la possession effective du terrain. La cour a confirmé que le terrain, qui mesure 106,34 acres (43,03 hectares) et vaut environ ₹380 crore (45 millions USD), a été classé zone protégée en vertu de Loi sur les forêts de l’Andhra Pradesh (Loi sur les forêts de l’A.P.). La Haute Cour, exerçant sa compétence d’examen, a ensuite annulé sa propre décision en 2021 sur l’insistance du plaignant, qui invoquait de « nouveaux éléments de preuve » lui octroyant la propriété.

La Cour suprême de l’Inde a, en appel, annulé la décision de 2021 de la Haute Cour et rétabli le rejet prononcé antérieurement en 2018. Avant d’en arriver à cette décision, le juge M. M. Sundresh traite des antécédents constitutionnels, législatifs et revendicatifs qui imposent au gouvernement indien l’obligation positive de réduire au minimum les dommages causés à l’environnement pour autant que cela soit pragmatique et possible.

La Constitution de l’Inde, 1950, définit plusieurs principes directeurs dont le gouvernement indien doit tenir compte dans la mise en œuvre de politiques. L’un d’eux consiste à imposer à l’État (article 48A) et à ses citoyens (article 51A(g)) l’obligation positive de « protéger et améliorer l’environnement naturel… », notamment en assurant la protection et l’existence continues des forêts. Le système judiciaire indien tient compte de ces principes directeurs au vu des droits fondamentaux protégés par la constitution, en particulier par l’article 21, qui stipule que « personne ne peut être privé de sa vie ou de sa liberté personnelle si ce n’est selon la procédure établie par la loi ».

La Loi sur les forêts de l’A.P. découle des articles 48A et 51A, qui visent à conserver et élargir la couverture forestière protégée par le gouvernement. Elle donne au gouvernement la capacité d’identifier des droits privés dans d’éventuelles zones forestières protégées et de s’attribuer la propriété de ces terres, à condition qu’il y ait un préavis suffisant et une juste compensation. Le terrain forestier en question relève du champ d’application de la Loi sur les forêts de l’A.P.

Le juge Sundresh a également traité de la justice environnementale en tant que cadre. Sundresh affirme que les forêts sont « l’esprit… qui fait tourner la terre » et que l’humanité a l’obligation « d’agir à titre de fiduciaire » de la planète. Plaidant en faveur d’un changement d’optique vers le « biocentrisme », Sundresh considère que la priorisation de la durabilité fait partie intégrante de la viabilité économique future de l’Inde, ainsi que de la vie et du bien-être de ses citoyen-ne-s. Cela s’étend à la conservation des forêts actuelles de l’Inde.

La Cour suprême indienne a finalement jugé que la décision de la Haute Cour était une abdication flagrante de son rôle de protection et de conservation des zones forestières. Lors de l’examen des litiges environnementaux, le système judiciaire indien a l’obligation d’équilibrer les avantages économiques, les avantages environnementaux et les droits de propriété de la partie adverse. L’acteur présumé avoir contribué à la dégradation environnementale doit prouver le contraire. La Haute Cour a manqué à cette obligation, appliquant mal la loi en octroyant un titre de propriété à un particulier qui n’a pu prouver qu’il était bel et bien propriétaire.

Par ailleurs, la Cour suprême a conclu que la Haute Cour indienne avait abusé de sa compétence d’examen. Cette compétence ne s’applique que lorsqu’il y a une erreur ou une faute « apparente à la lecture du dossier » — ce qui serait perceptible au premier coup d’œil — ou pour « toute autre raison suffisante ». Cette disposition générale est extrêmement restrictive, mais prévoit la découverte de nouveaux éléments de preuve qui étaient indécouvrables au moment de la décision originale. Cependant, les « nouveaux éléments de preuve » quant au titre de propriété étaient fondées sur une enquête effectuée de manière irrégulière en 2019, et ne répondaient pas au critère d’examen, encore moins de l’annulation.

Enforcement of the Decision and Outcomes

La Cour suprême a conclu que la Haute Cour avait exercé indûment sa compétence d’examen en n’appliquant pas correctement le critère exceptionnellement strict justifiant l’annulation et a infirmé la décision rendue par celle-ci. Le jugement antérieur contre le plaignant a ainsi été rétabli. Étant donné que cette décision de 2018 de la Haute Cour de Telangana concluait que le plaignant n’avait pas prouvé être propriétaire du terrain au départ, la forêt demeure une terre protégée en vertu de la Section 15 de la Loi sur les forêts de l’A.P.

La zone forestière en question est située tout près de la grande ville indienne de Hyderabad, qui abritera bientôt le plus grand bureau de Google en dehors de son siège social en Californie — cette décision y aura probablement un certain impact.

Certaines entreprises en Inde contournent les lois de protection contre la déforestation en abattant quand même des arbres et compensent ensuite ces actions en reboisant ailleurs. Peu après cette décision, le ministre en chef du Telangana A. Revanth Reddy a ouvert une enquête sur les cas de ce genre — où les entreprises privées empiètent sur les terres forestières protégées. L’investigation vise précisément « l’enquête irrégulière » mentionnée dans la présente affaire. Les faits reprochés sont notamment les suivants : collusion possible entre les intrus à Kompally et les autorités locales, ingérence politique, manipulation des rapports et présentation d’une fausse déclaration sous serment à la Cour suprême indienne.

Significance of the Case

Depuis 2014, l’Inde a connu des tentatives répétées d’affaiblissement des lois concernant l’environnement ou la conservation, où des organes du pouvoir exécutif prennent des décisions hâtives, irréfléchies et irraisonnées pour effectuer une dérèglementation. Cela passe par l’adoption de modifications aux principales lois indiennes de protection de l’environnement, la création d’exceptions légales au champ d’application de ces lois ou l’insistance sur la compensation des violations environnementales plutôt que la prévention des préjudices au départ.

Cette décision de la Cour suprême indienne découle d’une longue série de litiges climatiques récents combattant ces manquements à l’obligation positive qu’a l’État de protéger l’environnement. Le juge Sundresh a signé plusieurs de ces décisions, faisant preuve d’un dévouement constant et fervent pour la protection de l’environnement et présentant un éventail exceptionnellement large d’arguments dans ses décisions. La jurisprudence environnementale de l’Inde relie le besoin d’atténuer les changements climatiques au « droit à la vie » protégé par la Constitution indienne. Le juge Sundresh reproche directement et sans détour à la Haute Cour du Telangana et à d’autres autorités exécutives d’avoir délibérément fait fi de leur obligation de protéger ce droit à la vie. Il dénonce le recours à des décrets-lois qui modifient arbitrairement les politiques concernant les ressources naturelles et visent à frustrer et retarder l’introduction d’une législation intégrale en matière de protection environnementale. La décision touche aussi au cœur même des pratiques d’empiètement qui font maintenant l’objet d’une enquête ministérielle.

Concernant plus particulièrement la présente affaire, la zone forestière de Kompally a été sauvée grâce aux critères stricts que doivent respecter les tribunaux dans l’exercice de leur compétence d’examen. Toute annulation au titre de cette compétence exige la preuve d’une « qualité irréprochable » — l’enquête irrégulière (et prétendument frauduleuse) dont il est question ici n’était, en fait, pas irréprochable. Ce critère strict d’établissement de la preuve indique que, pour les futurs litiges d’intérêt public en Inde, il faudra mettre l’accent sur l’établissement de solides conclusions de fait dans les juridictions inférieures.

Nous remercions particulièrement de ses contributions le membre du Réseau DESC : Program on Human Rights and the Global Economy at Northeastern University (PHRGE).