Placer les soins au coeur d'une approche féministe intersectionnelle de la perte et du dommage

Date de publication : 
Jeudi, 19 mai 2022

Alors que la pandémie et l'escalade de la crise climatique ont exacerbé les inégalités et nous ont rappelé la place centrale qu'occupent les soins dans nos sociétés, le Réseau-DESC a organisé un événement parallèle à la CSW66* intitulé "Centering Care In a Feminist Intersectional Approach to Loss and Damage" (24 mars 2022). Au cours de cet événement, des défenseur/euse-s des droits des femmes et des militant-e-s féministes de toutes les régions ont réfléchi à la promotion des actions visant à assurer une transition rapide, équitable, écologiquement durable et juste des combustibles fossiles vers une société zéro carbone, régénératrice et fondée sur les soins, qui soit axée sur le bien-être des personnes et de la planète.

Dans leurs interventions, les participantes ont souligné que la crise climatique et les pertes et dommages qui en résultent ont un impact disproportionné sur les personnes marginalisées, y compris les femmes et les filles dans toute leur diversité, ainsi qu'à travers les identités de genre et les orientations sexuelles, pointant du doigt le capitalisme et le patriarcat comme moteurs structurels de la crise climatique. Elles ont également souligné l'immense pouvoir de transformation des luttes féministes et environnementales lorsqu'elles sont liées.

Lors de l’échange en ligne plusieurs personnes sont intervenues: Charlene May, Women's Legal Center (WLC), Afrique du Sud; Alejandra Lozano, The Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights (GI-ESCR); Tetet Nera-Lauron, Rosa Luxemburg Stiftung; Claudia Lazzaro, Sindicato Obreros Curtidores De La República (SOCRA); Eydi Blanco, Organización Fraternal Negra Hondureña; et Hala Murad, Dibeen Association for Environmental Association; Kavita Naidu, avocate internationale spécialisée dans les droits humains, et Kate Donald, Center for Economic and Social Rights (CESR), ont co-modéré la session.

Dans son introduction, Kavita Naidu a ouvert la session en nous rappelant que "les femmes sont les principales gardiennes de notre société - elles soutiennent nos économies en prenant soin de la vie et de notre bien-être social." Faisant écho à ces mots, Charlene May (Women's Legal Center) a invité à remettre en question les discours et les approches dominants autour du travail de soins, en particulier à la lumière de la pandémie actuelle de Covid-19. Selon elle, "nous devons rejeter la croissance économique comme le paradigme dominant et unique du développement et comprendre que la croissance économique illimitée et la recherche du profit ne sont pas durables pour toutes les formes de vie."

Si le travail de soin dépend principalement des femmes, une contribution largement méconnue, invisibilisée et précarisée par le modèle capitaliste patriarcal dominant, les femmes sont également à la pointe de la lutte contre les crises du climat et de la biodiversité. Selon Tetet Nera-Lauron, Rosa Luxemburg Stiftung: "Lorsque des catastrophes surviennent, les femmes leaders lancent des cuisines communautaires. Des volontaires de la communauté offrent leur aide pour préparer et distribuer la nourriture. Et parce qu'elles sont elles-mêmes des survivantes de ces calamités, elles peuvent réagir rapidement, en s'aidant elles-mêmes et en aidant d'autres survivant-e-s de leur communauté avec des repas chauds et d'autres produits alimentaires essentiels."

Parce que la crise climatique touche les femmes dans tous les domaines de leur vie, le monde du travail est également impacté par les pertes et les dommages. Claudia Lazzaro (SOCRA) a mis en avant les conséquences des catastrophes climatiques sur les conditions de travail des femmes, notamment des employées de maison, qui travaillent souvent dans des conditions précaires et dans le secteur informel.  "Les emplois les plus précaires sont exercés par les femmes et les personnes LGBT. La précarité de la pauvreté est portée par nos corps et nos familles. Nous devons repenser la société, l'économie des soins et refonder un pacte social de soins plus juste et durable pour nos corps, nos familles et nos communautés. ".

Kate Donald (Center for Economic and Social Rights) a rappelé lors de cet événement que "les soins aux personnes et les soins à l'environnement sont des biens collectifs" et a souligné la demande collective du Réseau-DESC concernant l'urgence d'un nouveau pacte social sur les soins.

Se concentrant sur le rôle des cadres de transition juste et sur l'élargissement de la fourniture et de l'accès à des services publics de qualité, tels que les énergies renouvelables et la protection sociale, Alejandra Lozano (The Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights) a souligné que pour "réduire le fardeau des pertes et des dommages chez les personnes et les communautés touchées, nous devons favoriser un cadre de transition juste qui place le genre, les soins et la protection des écosystèmes au cœur de la transition vers un avenir durable et juste."

Alors que le discours sur les pertes et dommages est encore largement dominé par des discussions techniques et politiques, Eydi Blanco (Ofraneh) nous a rappelé qu'au niveau communautaire, les femmes sont déjà très actives dans la mise en œuvre de solutions holistiques liant le travail de soin à la protection de l'environnement et aux conditions de vie locales. Selon Eydi, "au Honduras, les impacts climatiques ou les pertes et dommages sont très répandus et ont énormément affecté les droits humains. Alors que nous faisons face aux pertes et aux dommages, nous devons également penser à mettre en avant et à mettre en œuvre des alternatives et des solutions dirigées par la communauté."

Il ne suffit pas de dire que les femmes jouent un rôle important dans cette intersection entre le climat et le travail de soin. Elles doivent être activement impliquées dans l'analyse des problèmes et dans l'élaboration et le suivi des mesures visant à prévenir, anticiper et répondre aux catastrophes liées au changement climatique. Selon Hala Murad (Dibeen Association for Environmental Association, Jordanie), "nous devons intégrer la dimension de genre dans chaque discussion sur les pertes et dommages et le changement climatique. Nous devons mettre nos efforts en commun pour apporter un réel changement".

Regardez la vidéo de l'événement parallèle ici: (Disponible uniquement en anglais)

CSW66 NGO Forum: Virtual Parallel Event (2022) - Loss and Damage & Care

Voir la conversation sur Twitter: (Disponible uniquement en anglais)

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Cet événement est l'un des deux événements organisés par les membres du Réseau-DESC dans le cadre de la CSW66.

Le 23 mars 2022, le Réseau a accueilli l'événement parallèle virtuel:

"Garantir les droits fonciers des femmes face à l'emprise par les entreprises des solutions aux crises du climat et de la biodiversité".

Regardez la vidéo de l'événement parallèle ici: (Disponible uniquement en anglais)

CSW66 NGO Forum: Virtual Parallel Event (2022) - Women's Land Rights

Voir la conversation sur Twitter: (Disponible uniquement en anglais)

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*  Chaque année, au mois de mars, les représentant-e-s des États membres se réunissent à New York pour évaluer les développements et les mesures visant à faire progresser l'égalité des sexes et les droits des femmes dans le monde. Lors des sessions de la Commission de la condition de la femme des Nations unies (CSW), de nombreuses organisations de la société civile, des féministes et des défenseur/euse-s des droits des femmes se réunissent pour porter leurs revendications à l'attention des États et réfléchir ensemble aux stratégies à adopter pour améliorer significativement les droits des femmes.