Kenya: mettre fin au harcèlement administratif à l’égard de la Kenya Human Rights Commission et d’autres ONG kenyane des droits humains

Veuillez signer cette pétition pour arrêter le harcèlement administratif des ONG des droits de l'homme au Kenya. La date limite pour recevoir les signatures est le 31 Décembre 2015.

À : Son excellence honorable Uhuru Kenyatta, Président du Kenya

RE : préoccupations concernant un récent harcèlement administratif à l’égard de la Kenyan Human Rights Commission et d’autres ONG kenyane des droits humains

Votre Excellence,

Nous soussignés, individus et organisations du monde entier travaillant à la protection des droits humains, aimerions exprimer respectueusement nos préoccupations quant à des informations que nous avons reçues concernant des actions récentes du conseil kenyan de coordination des ONG qui, selon nous, représentent un harcèlement administratif à l’égard de plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) kenyanes, et particulièrement la Kenyan Human Rights Commission (KHRC).

KHRC est une organisation des droits humains respectée qui se bat pour la promotion des droits humains, des valeurs démocratiques et de la justice sociale au Kenya. Nous avons été informés de la décision du mois d’octobre 2015 du conseil kenyan  de coordination des ONG (le conseil) de radier du registre des ONG 957 organisations kenyanes, dont KHRC, si elles ne présentent pas des comptes ayan été soumis à l’audit sous une période de 14 jours. Selon ce qui nous a été rapporté, KHRC n’a pas reçu de notification préalable quand à cette décision et n’a pas non plus été informée des préoccupations concernant la tenue de ses comptes. Nous avons aussi été informés du communiqué de presse du conseil publié le 28 octobre 2015 et accusant KHRC de ne pas avoir déclaré 1.2 milliards de KES, de gérer quatre comptes illégaux et de transmettre des rapports financiers inexacts.

Nous apprécions la décision du 30 octobre 2015 du ministère de la  décentralisation et la planification nationale d’ordonner la révocation de la décision de délivrer des avis de radiation du registre. Nous sommes cependant préoccupés par le fait que cette tentative de radiation du registre de KHRC et autres ONG fasse partie d’une campagne plus large de mesures systémiques, juridiques ou administratives, pour discréditer, réprimer et empêcher les organisations indépendantes de la société civile d’entreprendre un travail légitime en faveur des droits humains, au Kenya. Au cours des deux dernières années, le conseil de coordination des ONG a proposé quatre ensembles d’amendements au Public Benefits Act (PBO Act 2013), demandant, entre autres, de  limiter les financements étrangers à 15 pourcent, d’ébranler l’autoréglementation et d’imposer une régulation exécutive nationale excessive. De plus, en décembre 2014, le Bureau a radié du registre 540 organisations, même s’il a ensuite rapidement réintégré 179 organisations une fois qu’elles avaient prouvé qu’elles étaient en pleine conformité avec la loi. En juin 2015, sur recommandation du conseil, le gouvernement a gelé les comptes des organisations de défense des droits humains Haki Africa et MUHURI. Moins de deux mois après, la Haute Cour a jugé qu’il y avait non lieu et a levé l’interdiction d’utiliser les comptes.  

Nous, soussignés, dénonçons  le harcèlement à l’égard de KHRC et d’autres ONG au Kenya, qui semble avoir pour objectif de les empêcher de mener leur travail légitime en faveur des droits humains. Nous souhaitons aussi exprimer notre préoccupation concernant un mode d’action du gouvernement qui semble être destiné à limiter l’espace et le travail de la société civile au Kenya. C’est en ce sens que nous aimerions attirer votre attention sur des normes internationales largement reconnues concernant la protection des défenseurs des droits humains.

Tout d’abord, nous souhaitons rappeler les obligations du Kenya en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques -dont le Kenya est état partie- y compris le droit à la liberté d’expression, le droit à la liberté de réunion pacifique, et le droit à la liberté de s’associer librement avec d’autres. Nous rappelons aussi à votre excellence l’importance du rôle des ONG et des défenseurs des droits humains dans la mise en œuvre des droits humains, tel que l’indique la résolution 22/6 du conseil des droits de l’homme de l’ONU reconnue en 2013. En vertu de la résolution susmentionnée, le Kenya a l’obligation de « créer un climat sûr et porteur qui permette aux défenseurs des droits de l’homme d’agir sans entrave et en toute sécurité » et de s’assurer « que la législation affectant les activités des défenseurs des droits de l’homme et leur mise en application [soit] en accord avec le droit international relatif aux droits humains » La résolution appelle aussi les États à s’assurer qu’ils « n’imposent pas de restrictions de façon arbitraire aux sources potentielles de financement dont l’objectif est de soutenir les activités des défenseurs des droits de l’homme . »

De plus, la déclaration de l’ONU sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus dispose que “ Chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international.” et établit que “ L’État prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés.”

En vertu de la résolution sur le droit à la liberté d’association de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, la réglementation de l’exercice de la liberté d’association doit être cohérent avec les obligations des États en vertu de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples. Comprenant les activités des ONG dans la liberté d’association, la résolution stipule que toute interférence avec ce droit qui n’est pas proportionnelle et qui ne peut pas être justifiée au titre de l’article 27 de la Charte est considérée comme arbitraire. Finalement, la résolution 119 du rapporteur spécial sur les défenseurs des droits humains de la commission africaine rappelle aux États leurs obligations en vertu de la déclaration de l’ONU sur les défenseurs des droits de l’homme, et « exhorte les Etats parties à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer à tous les défenseurs des droits de l’homme un environnement propice à l’exécution de leurs activités sans crainte d’actes de violence, de menaces, de représailles, de discrimination, d’oppression ou d’actes arbitraires de la part d’acteurs étatiques ou non étatiques, suite à leurs activités de défenseurs des droits de l’homme. »

Nous vous exhortons, ainsi que toutes autres autorités kenyanes pertinentes, à prendre les mesures suivantes :

1. Garantir dans toutes circonstances la sécurité physique et psychologique et l’intégrité des membres de KHRC, ainsi que de tous les défenseurs des droits humains au Kenya ;  

2. Renoncer à toutes mesures juridiques ou administratives contre KHRC et leurs membres, ou contre toute autre organisation des droits humains au Kenya, qui empêche ou fait obstacle au travail légitime  en faveur des droits humains, dont, mais sans se limiter à : la menace de ou la réelle radiation du registre des ONG des droits humains ; l’introduction de lois ou politiques limitant les financements ou l’accès aux ressources ; les restrictions sur la liberté de mouvement ; et tout harcèlement et intimidation de personnes travaillant pour les ONG ;

3. Reconnaître l’importance du rôle de la société civile dans la promotion de la tolérance dans la lutte contre l’extrémisme violent et assurer un environnement favorable dans lequel les défenseurs des droits humains et la société civile peuvent agir sans entrave et en toute sécurité, et

4. Se conformer à toutes les dispositions du PIDCP, de la déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’homme, de la résolution 22/6 de 2014 du conseil des droits de l’homme de l’ONU, de la résolution sur le droit à la liberté d’association de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, et la résolution 119 du rapporteur spécial sur les défenseurs des droits humains de la Commission Africaine des droits de l’Homme et des Peuples.  

Respectueusement,

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