Summary
Dans cette affaire portée devant la Cour des réclamations foncières d’Afrique du Sud, le juge a rejeté une demande d’expulsion de plusieurs familles de la propriété connue sous le nom de ferme Hammansdans. La demande a été introduite par First Realty (Krugersdorp) (Pty) Ltd. (« requérant »), en vertu des dispositions de la loi sur l’extension de la sécurité de la tenure (« ESTA »), une loi promulguée pour fournir des mesures d’assistance de l’État afin de faciliter la sécurité à long terme de la tenure foncière, de protéger les droits des propriétaires et des personnes qui résident sur la terre avec leur consentement (c’est-à-dire les « occupants »), et de réglementer les conditions et les circonstances dans lesquelles les personnes peuvent être expulsées de leurs maisons (voir la loi sur l’extension de la sécurité de la tenure, 62 de 1997 (S. Afr.)). Estimant que le requérant n’avait pas suffisamment démontré que les droits de résidence des défendeurs avaient pris fin en vertu de l’ESTA, ni qu’il considérait les enfants adultes non dépendants comme des occupants de plein droit, et qu’il n’avait pas respecté les conditions d’une ordonnance d’expulsion, le tribunal a rejeté la demande d’expulsion.
Les vingt-six défendeurs de l’affaire ont été répartis en sept ménages (42 personnes) résidant sur la propriété, chaque ménage étant attribué à un employé actuel ou ancien du requérant ou de son prédécesseur. Les employés actuels et anciens avaient vécu avec une combinaison de leurs conjoints, enfants adultes et/ou enfants mineurs sur les lieux pendant des années avant que le requérant n’achète la ferme.
Le différend concernant les droits des familles intimées d’occuper la propriété Hammansdans remonte à octobre 2012. À cette époque, le requérant a conclu un accord écrit avec les employés, qui prévoyait expressément qu’ils avaient « le droit d’avoir des parents vivant sur les lieux ». En octobre 2015, le requérant a cherché à conclure une nouvelle série d’accords avec les occupants qui incorporaient une nouvelle politique de logement. Le requérant a commencé à demander à chaque employé de prendre les mesures nécessaires pour se conformer à sa prétendue politique de logement et d’expulser leurs propres enfants adultes. Cela signifiait que les enfants qui atteignaient l’âge de dix-huit ans et/ou devenaient autonomes devaient quitter le logement. Le requérant a organisé une série de réunions censées discuter de cette prétendue politique de logement.
En avril 2017, le requérant a envoyé des avis aux défendeurs exigeant que les enfants adultes non dépendants quittent les lieux dans un délai de trente jours. Après d’autres discussions infructueuses, le requérant a envoyé une autre série d’avis à chaque employé, ex-employé et à leurs conjoints en mars 2018. Un dernier avis a été envoyé le 30 avril 2018, demandant à tous les intimés de quitter les propriétés avant la fin du mois suivant, y compris les employés actuels et anciens et leurs conjoints.
Dans son affidavit fondateur, le requérant a allégué que le droit de chaque employé actuel et ancien d’étendre leurs droits d’occupation était limité à leurs conjoints et à leurs enfants mineurs/dépendants. En tant que tel, le requérant considérait uniquement les employés et ex-employés comme des occupants de plein droit au sens de l’ESTA, et tous les autres membres de la famille comme bénéficiant de leurs droits de résidence par procuration à travers eux. Pour leur part, les défendeurs ont soutenu que cette prétendue politique de logement constituait une limitation déraisonnable et injustifiable de leur droit à la vie familiale en vertu de l’ESTA.
Le tribunal s’est appuyé sur une analyse de l’ESTA pour prendre sa décision, exigeant avant tout que le requérant prouve qu’il avait effectivement et justement mis fin aux droits de résidence de tous les occupants de la propriété. D’emblée, le tribunal a constaté que le requérant n’avait pas allégué dans son affidavit fondateur qu’il avait formellement mis fin aux droits de résidence de l’un quelconque des défendeurs. En outre, il a estimé que la tentative du requérant de déduire les droits de résidence des enfants adultes non dépendants de leurs parents était inadmissible. Au contraire, les enfants adultes non dépendants étaient des occupants à part entière, ayant droit à la pleine protection de l’ESTA.
En vertu de l’article 8 de l’ESTA, le droit de séjour peut être résilié pour une cause « juste et équitable », après examen de toutes les circonstances pertinentes. Dans cette affaire, le tribunal a particulièrement évalué (1) l’équité de la politique de logement prétendument conclue avec les employés et ex-employés, et (2) l’équité de la procédure du requérant qui a donné aux défendeurs la possibilité de présenter des observations avant la résiliation de leurs droits de résidence. Le requérant s’est appuyé sur la politique de logement pour soutenir que les employés et ex-employés étaient en violation d’un contrat qui interdisait aux enfants adultes non dépendants d’occuper la propriété. Toutefois, les adultes non dépendants n’ont jamais été parties à cet accord et n’ont pas non plus été invités aux réunions organisées pour discuter de cet arrangement. Le tribunal a estimé qu’un accord conclu uniquement par les employés actuels et anciens ne pouvait pas s’étendre aux enfants adultes non dépendants. En outre, il a noté que les adultes non dépendants n’étaient pas traités comme des occupants à part entière et qu’ils n’avaient guère eu l’occasion de présenter des observations en leur nom propre lors des réunions qui ont précédé la décision de mettre fin à leurs droits de résidence. Par conséquent, la résiliation des droits de résidence des défendeurs n’aurait pas été juste ou équitable.
Conformément à ce qui précède, le tribunal a rejeté la demande d’expulsion et tous les défendeurs ont conservé leurs droits de résidence sur la propriété.