Le rapport du procès pour meurtre de Berta souligne que justice n'a pas été rendue

Date de publication : 
Mercredi, 26 février 2020

Le rapport publié par la Misión de Observación Calificada Caso Berta Cáceres révèle plusieurs faiblesses et lacunes dans le processus relatif au procès pour le meurtre de la dirigeante autochtone hondurienne et défenseure des droits humains (FDDH) Berta Caceres en 2016. La  Misión de Observación Calificada comprend les membres du Réseau-DESC Commission internationale de juristes (CIJ), le Centro por la Justicia y el Derecho Internacional (CEJIL), Centre pour la justice et le droit international (CEJIL), Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et Due Process of Law Foundation (DPLF).

Berta Caceres était une FDDH éminente et c’était la fondatrice du Consejo Cívico de Organizaciones Populares e Indígenas de Honduras (COPINH). Elle a été internationalement reconnue pour le travail qu’elle a mené pour assurer la survie de sa communauté autochtone Lenca, au Honduras, face à un projet hydroélectrique financé sur le plan national et international sur ses terres. Le projet hydroélectrique a été lancé sans le consentement libre, préalable et éclairé de la communauté autochtone et Berta Caceres a joué un rôle clé dans la résistance face à la construction.

Le 2 mars 2016, Berta Caceres a été assassinée à son domicile par des hommes armés. Gustavo Castro, membre du réseau ESCR Otros Mundos AC Chiapas, qui était avec elle pendant l'attaque, a été blessé.

La Misión de Observación Calificada a été créée en juillet 2018 pour observer le procès de 8 hommes accusés du meurtre de Berta Caceres. Les hommes, qui sont un mélange d'anciens membres de l'armée hondurienne et d'employés de Desarrollos Energéticos S.A. (DESA), la société derrière la construction du projet hydroélectrique, ont été condamnés à entre 30 et 50 ans de prison.

C'est la première fois qu'une condamnation pénale est prononcée pour le meurtre d'un défenseur des droits humains au Honduras. Depuis le meurtre de Berta, de nombreux défenseurs des droits humains autochtones et d’ascendance africaine ont été tués dans le pays, qui souffre de l’impunité. Cela comprend les membres du mouvement afro-descendant Garifuna, l’ Organización Fraternal Negra Hondureña (OFRANEH). Selon l'analyse mondiale 2019 de Front Line Defenders, le Honduras figure toujours parmi les trois pays les plus dangereux pour les défenseurs des droits humains.

Le rapport publié le 11 février 2020 par la Misión de Observación Calificada met en évidence plusieurs faiblesses dans le processus relatif au procès, notamment l'absence d'enquête sur les auteurs intellectuels du meurtre et l'obstruction à une telle enquête par les autorités. Il a aussi été constaté, entre autres, un manque d'accès à l'information et un processus arbitraire.

De même, le rapport met en évidence les schémas structurels de préoccupation liés à l'affaire. Avant son meurtre, Berta Caceres s'était vu accorder des mesures de protection par la Commission interaméricaine des droits de l'homme. Jusqu'à présent, personne n'a été tenu responsable du défaut de protection de Berta Caceres. Le rapport souligne également des lacunes dans la lutte contre la fraude présumée au moment du processus d'octroi de la concession à DESA, un manque de consentement libre, préalable et éclairé, ainsi qu’une manipulation des preuves.

Le rapport présente plusieurs recommandations, notamment l’établissement immédiat de protocoles d’enquête sur les crimes contre les défenseurs des droits humains conformément aux normes internationales et la prise de mesures pour garantir la protection des droits des peuples autochtones en vertu des principes de non-discrimination et d’autodétermination.

L'assassinat de Berta Caceres est emblématique des attaques subies par les défenseurs autochtones des droits humains. Souvent, ils sont en première ligne dans la promotion d’un modèle de développement différent. Cela les oppose à de puissants intérêts économiques et politiques, ce qui en fait des cibles d'attaques. Dans le passé, les membres du Réseau DESC ont souligné la nécessité de respecter les droits fonciers des autochtones afin de mettre un terme aux massacres de défenseurs des droits humains autochtones, dont beaucoup restent anonymes.

Pour lire le résumé du rapport (en espagnol), veuillez cliquer ici.