La victoire du mouvement social des agriculteurs en Inde sur le géant mondial de l'acier

Date de publication : 
Mercredi, 22 mars 2017

Partout dans le monde, les mouvements sociaux et les défenseurs des droits humains célèbrent la suspension définitive du projet POSCO-Inde. Le projet, qui représentait la principale source d'investissements directs étrangers (IDE) dans l'histoire de l'Inde, impliquait un immense complexe sidérurgique intégré. Le projet POSCO-Inde comprenait une mine, une fonderie et un port captif, et s’étendait sur près de 5000 hectares. Ce dernier a également imposé le déplacement forcé de 20 000 personnes qui ont été contraintes de quitter leurs terres, leurs domiciles et leurs moyens de subsistance.

Travail Collectif - POSCO

Le membre du Réseau-DESC, Posco Pratirodh Sangram Samiti (Mouvement du peuple anti-Posco ou P.P.S.S) est apparu en 2005 après avoir pris connaissance de la signature d'un protocole d'entente entre l’entreprise POSCO basée en Corée et le gouvernement de l'État du nord-est indien de l’Odisha. Le P.P.S.S a lutté pendant douze ans afin de conserver ses terres et de poursuivre ses pratiques d’encadrement durable, axées autour de la culture de la vigne de bétel ainsi que l'anacardier et le manguier, les rizières et la production de crevettes.

Un rapport publié en 2013 par le Réseau-DESC et la Clinique internationale des droits humains (IHRC) de la NYU School of Law, a conclu que l'acquisition de terres pour le mégaprojet avait été accompagnée d'un recours excessif à la force par la police locale et avait été liée à des abus et des violations des droits humains, notamment des droits à l'alimentation, à la santé, au logement, à l'éducation et à l'eau. Ces conclusions, ainsi que l'analyse et le leadership du P.P.S.S, ont inspiré une vingtaine de membres du Réseau-DESC en Inde, en Corée du Sud, dans l'UE et aux États-Unis à entreprendre un plaidoyer collectif axé sur les obligations du gouvernement indien en matière de droits humains, les responsabilités de l’entreprise POSCO en matière de droits humains et les obligations extraterritoriales du gouvernement sud-coréen en matière de droits humains. Elles ont également suscité des protestations d'un grand nombre de défenseurs des droits humains et de la responsabilité des entreprises, dont huit titulaires de mandat des procédures spéciales des Nations Unies qui, dans une mesure sans précédent, ont envoyé des communications distinctes aux Gouvernements d'Inde et de Corée du Sud ainsi qu’à POSCO en 2013. Leurs lettres ont attiré l'attention sur les obligations extraterritoriales et les responsabilités de POSCO en tant qu’entreprise figurant dans la liste Fortune 500 et ont invité le gouvernement indien à suspendre le projet jusqu'à ce que les problèmes relatifs aux droits humains soient adéquatement traités.

Avec le soutien de ces derniers et d'autres alliés, face à la criminalisation et à l'occupation littérale de ses villages et écoles par les forces de police, le mouvement social des personnes affectées par le projet célèbre désormais une victoire. Tout en se réjouissant du fait que le projet POSCO-Inde n’ira définitivement pas de l’avant, le P.P.S.S continue de réclamer la restitution de toutes les terres qui ont été accaparées pour le projet et le respect intégral des protections juridiques existantes pour les communautés reconnues concernant la propriété, l’usage et la gestion des terres. Le P.P.S.S exige également que le gouvernement indien retire les centaines d’accusations criminelles fausses ou infondées contre les membres du mouvement social qui, d’après leur porte-parole, ont été utilisées pour incriminer les villageois ayant agi pour défendre les droits humains.

L'annulation du projet POSCO-Inde représente également une opportunité majeure pour le gouvernement indien de prendre une démarche proactive pour soutenir les communautés affectées, conformément aux obligations existantes en matière de droits humains et au programme pour le développement durable. La réalisation des droits humains dans ce contexte impliquera, entre autres initiatives, des enquêtes et des remèdes appropriés pour les violations passées des droits humains, des mesures pour créer un environnement propice à la régénération et à la recherche de moyens de subsistance, l'adoption d'approches agricoles participatives et durables, et un changement politique et pratique afin que toutes les négociations ou accords d'IDE reconnaissent la fonction sociale et culturelle des terres et des ressources naturelles ainsi que la primauté des obligations étatiques en matière de droits humains sur les intérêts commerciaux.

Lisez le communiqué de presse du Réseau-DESC ici