Les membres se mobilisent en faveur des droits humains en réponse à l'administration Trump

Date de publication : 
Lundi, 30 janvier 2017

Le gouvernement des États-Unis a menacé de porter systématiquement atteinte aux droits humains des communautés des États-Unis et du monde entier durant la première semaine qui a suivi l’investiture du président Donald Trump. Au cours des premiers jours suivant l'élection de Trump, le Media Mobilizing Project (États-Unis), le National Economic and Social Rights Initiative (États-Unis) et le Center for Economic and Social Rights (États-Unis), ont émis des déclarations publiques anticipant de graves menaces aux droits civils, sociaux, économiques et politiques . Reconnaissant que ces menaces étaient aussi bien mondiales que domestiques, Juana Kweitel (Conectas, Brésil) s'est jointe à Anthony Romero (ACLU, États-Unis) pour rédiger l’article "L’administration Trump est effrayante au regard des droits humains."

Avant même que la première semaine de Trump ne soit terminée, le Center for Reproductive Rights (États-Unis) et d'autres membres ont contesté le décret de Trump pour rétablir la «règle du bâillon mondial» et réduire l'accès aux services d'avortement médicalisés. Le Center for Constitutional Rights (États-Unis) a dénoncé le profilage des musulmans, notamment l’interdiction de délivrer des visas pendant 90 jours aux citoyens de sept pays différents, tout en bloquant l’entrée aux États-Unis pendant 120 jours pour tous les réfugiés et indéfiniment pour les réfugiés syriens. La Commission internationale de juristes (CIJ) (Suisse) a contesté l'approbation exprimée par Trump pour la pratique de la torture dans les opérations antiterroristes. Amnistie internationale (États-Unis) a contesté les violations des droits des peuples autochtones impliqués dans la tentative de Trump de relancer la construction de l’oléoduc Dakota Access, tandis qu’EarthRights International (États-Unis) a souligné les menaces pour l'environnement, les moyens de subsistance et les droits des communautés affectées causées par les efforts de Trump pour relancer les projets d’oléoducs Keystone XL  et Dakota Access. Le Center for International Environmental Law (États-Unis) a critiqué la nomination de Rex Tillerson, ancien PDG d’ExxonMobil, au poste de secrétaire d’État, tandis que Corporate Accountability International (États-Unis) a contesté la confirmation d’Andrew Puzder, PDG d’une chaîne de restauration rapide, au poste de Secrétaire au Travail, et a commencé à organiser des formations pour défier le programme de Trump.

Willie Baptist (Kairos: le Center for Religions, Rights and Social Justice, États-Unis) a présenté une réflexion fondée sur son expérience en tant que leader du mouvement de base au cours de différentes périodes politico-économiques aux États-Unis: « Après l’élection: Manifester, éduquer, s’organiser ». Le 21 janvier 2017, plus d'une trentaine de personnes - dont des représentants de Kairos et d'autres membres – ont défilé depuis le bureau du Réseau-DESC à New York afin de rejoindre des milliers et finalement des millions de personnes à la Marche des femmes. Un membre a défilé à l'aide d'une canne. Au cours de la marche, il a rencontré un autre représentant des membres qui était venu avec son enfant de 10 jours. Des amis ont défilé avec leur fille de 2 ans, après avoir écrit les numéros de téléphone de la famille et des amis sur son ventre au marqueur indélébile, au cas où ils seraient arrêtés et séparés d'elle. La diversité de nos identités superposées en tant que membres, employés et amis - jeunes et vieux ; homosexuels et hétérosexuels ; de familles ouvrières et aisées ; noirs, latinos, asiatiques et euro-américains ; immigrants de plusieurs pays ; musulmans, chrétiens, juifs, bouddhistes et athées - a suggéré une vision pour un avenir inclusif fondé sur l'égalité réelle et les droits humains.

La Marche des Femmes, ou toute manifestation, n'est pas identique à un mouvement durable de changement, mais elle a néanmoins été significative. Elle a été mondiale ; des marches au Ghana, en Argentine, au Royaume-Uni, au Mexique, au Kenya et ailleurs ont finalement attiré quelque cinq millions de personnes, dont des membres du Réseau-DESC et le personnel du secrétariat. Une des pancartes de la manifestation stipulait : « Dommage, même les introvertis sont ici. » Guidés par le contexte politique, peut-être encouragés par des amis ou par la famille, de nombreuses personnes qui n’avaient jamais manifesté auparavant se sont senties obligées d’agir. Pour d'autres - qui étaient déjà aux premières lignes des luttes contre l'aggravation des inégalités, de la marginalisation, de l'appauvrissement, du patriarcat et du changement climatique dans toutes les régions du monde - la période actuelle peut susciter le désespoir, la peur et la colère. Il était cependant également frappant de voir des inconnus devenir amis et rire et chanter tout au long de la marche. Un de nos groupes a chanté spontanément du métro jusqu’à notre bureau, où nous nous sommes rencontrés pour partager le petit déjeuner et faire des pancartes.

Le noyau des droits humains est composé de convictions concernant la dignité de chaque être humain, son droit au bien-être et à la participation, dans un monde qui peut changer. Pourtant, l'histoire des droits humains et de la justice sociale laisse à penser que le monde change par la lutte, par des personnes qui se réunissent pour revendiquer leur dignité et leurs droits, qui sont ultimement reliés aux droits de tous les autres humains. César Rodriguez (Dejusticia, Colombie) a écrit avec optimisme que "la victoire de Trump pourrait inciter le mouvement des droits humains à se transformer." Dans un article connexe, Chris Grove (Directeur exécutif du Réseau-DESC) a mis en exergue la Charte commune pour la lutte collective, rédigée par le Groupe de travail sur les mouvements sociaux et récemment réaffirmée par l'ensemble des membres du Réseau-DESC, faisant valoir que « les droits humains, en tant que mouvement  créé par les personnes affectées par l'injustice, qui critique activement les inégalités systémiques et affirme notre humanité commune et interdépendante, offre une alternative transformatrice à une politique de peur et d'exclusion ».

À titre d'exemple, la veille du nouvel l’an, reprenant une tradition qui unissait les esclaves et les abolitionnistes dans l'histoire des États-Unis, Kairos s'est joint à Repairers of the Breach pour organiser un service de "surveillance de nuit" à Washington, DC, qui a invité les leaders religieux et les « personnes dotées de conscience morale » à poursuivre les luttes interconnectées contre la pauvreté et le racisme en construisant une nouvelle Campagne pour les pauvres. De cette façon, et de bien autres encore, de nombreux membres du Réseau-DESC (mouvements sociaux et ONG) travaillent pour unir les luttes communautaires et mobiliser une action renouvelée pour garantir les droits humains.

Photo credit: 1-Montse Belver. 2-Corporate Accountability International. 3.MSNBC.